Cette semaine j’ai lu Le Figaro.

Au Café du Commerce de mon coin, on trouve tous les journaux. Surtout les pires. Et je les lis. C’est qu’il me faut bien connaître mes ennemis pour les combattre et tenter au mieux de les démolir. Le journal choisi cette semaine est celui de Dassault, phare de la pensée réactionnaire : Le Figaro. Je dois avouer que je me suis bien sali les mains pour éplucher ses pages. Rude épreuve quotidienne, croyez-moi.

Pour finir ma semaine en beauté, je suis allé 1. jeter un coup d’oeil aux tweets de Bruno Roger-Petit (journaliste de Challenges hier et chien de garde elyséen aujourd’hui) et 2. je suis allé saluer la Brigade policière de Libedesintox qui a inauguré en 2017 une collaboration très riche avec cette très belle Officine qu’est FaceBook.

*

Botul-Henri Lévy.

Dans le numéro du 3 avril, BHL a droit à une pleine page du Figaro (via Anne Fulda) pour son 43ème «livre». Pommade et brosse à reluire au rendez-vous. La «journaliste» rapporte les paroles d’admiration de François Pinault qui qualifie son poulain de «personnage rebelle» : «BHL a le regard large comme son père. Pas un regard obtus, étroit».

Dans cette ode à BHL, on apprend que le 13 mars dernier, à la Bibliothèque de l’Arsenal, Laurence Engel, présidente de la BNF, a accueilli son philosophe pour causer politique et éthique devant un auditoire impressionnant. Etaient présents : François Hollande, Kouchner, Milan Kundera, Michel Bouquet, Xavier Niel, Claire Chazal, Alain Minc, Claude Perdriel, Olivier Nora de Grasset, Olivier et Christine Orban, Jean-Paul Enthoven. Je ne résisterai pas à rapporter ici les belles paroles de ce dernier : «BHL est joyeux. Il faut, pense t-il, que notre vie soit une succession ininterrompue de moments agréables». «Ses moments agréables» ? Ben en voilà un.

*

Pinault, toujours lui.

Désormais désuète la chanson de Jacques Brel («Les Bourgeois, c’est comme les cochons/Plus ça devient vieux/Plus ça devient cons»). L’époque est à la transformation de ces Imbéciles du 19ème siècle en Mécènes chics et cultivés du 21ème. Voilà donc notre bon Pinault cuvée 2018 qui débourse 3 millions d’euros pour la restauration de la Hauteville House, la maison de Victor Hugo à Guernesey. Le Figaro rappelle discrètement les bonnes œuvres du Maître Pinault : dons pour la préservation de la Forêt de Brocéliande, pour la réfection du mobilier de Versailles, organisations de somptueuses réceptions/expositions dans son Palazzo de Venise. Admirateur de Hugo, ce bon père François Pinault aura tout le temps de méditer sur cette citation hugolienne qu’on pourrait classer dans la rubrique… Convergences des luttes : «La révolution littéraire et la révolution politique ont fait en moi leur jonction».

*

Trouvé dans le Figaro du 5 avril.

«Depuis les JO de Montréal, «le dépassement des budgets des Jeux d’été a été de +176% en moyenne» selon un étude conjointe réalisée en 2016 par l’Université d’Oxford et la Said Business School».

Nouvelle express.

Le site de L’Express ne pourra plus permettre aux internautes de lire gratuitement les articles (en nombre limité quand-même). Du côté des ventes en kiosque, ça ne va pas très fort : elles reculent de 9%. Du côté des abonnements, les pertes sont de 10%. (Source Le Figaro du mercredi 4 avril). Mais dans son article, Le Figaro oublie de dire combien touche L’Express via les aides publiques à la Presse. (Voir la ligne 3 dans le tableau présenté ici : ligne SFR avec Drahi comme proprio).  Deux chiffres : 5,548829 millions d’euros en aide directe et plus de 9 millions au total.

*

Roger-Petit, Macron et l’ami Martin Bouygues.

Macron va donc causer dans notre poste ce jeudi pendant une heure (sur TF1 et LCI). Bruno Roger-Petit, le Commissaire en chef de la Pub macronienne, a délivré un savoureux tweet dans lequel il écrit que «Macron a été invité» par les deux chaînes. Ecoute Bruno, je vais vite t’expliquer, hein ? C’est plutôt Macron qui s’est invité chez son pote Martin Bouygues. Et je vais te dire pour quelle raison. Tout simplement parce que ton Président banquier s’est rendu compte – via les rapports de ses Renseignements Généraux – que tout n’était pas si rose dans le pays. C’est que la mobilisation grandit à un point critique pour ton Chef. En réaliste qu’il est (je te l’accorde), ton gourou n’accorde aucun crédit aux sondages à la con d’Instituts de sondages à la con, de ceux qui donnent à 57% le pourcentage de français défavorables à la grève. Les sondages que distillent jour après jour FranceInfo-Figaro-JDD-LeParisien-Europe1-&Co etc sont pour les gogos. Pour ton Président des Riches, ces sondages manipulateurs ne font pas illusion. Lui et tous ceux de sa classe ne sont pas naïfs : oui, ça chauffe fort dans le pays. Faut éteindre les incendies. Alors, t’as compris, Bruno ?

*

Libedesintox et son troll préféré.

La Brigade de Liberation (Libedesintox) qui s’autoproclame Instance d’Objectivité et de Vérité ne supporte pas qu’on lui rappelle ces deux choses : 1. que leur Boss s’appelle Patrick Drahi et 2. que le journal – qui fit voter Macron à la Présidentielle 2017 – fait affaire avec FaceBook dont on a vu de quelle manière cette Officine de propagande utilisait les données individuelles de ses 211.667 abonné(e)s français.

Notre Brigade bien-aimée, dont on se demande si elle ne fait pas finalement partie d’une aile du Ministère de l’Intérieur, se félicite d’avoir délivré à son lectorat les chiffres sur son entente financière avec FaceBook. «Voyez, semble t-elle dire, on ne vous cache rien, hein ?».  Comme si ce simple aveu suffisait à la disculper. Waf waf.

Relevons la somme de leur contrat avec FaceBook : pour l’année 2017, via cette fructueuse collaboration, Libération a touché 100.000 dollars. Notons aussi la fierté sans complexe de sa Brigade d’avoir à toucher le double pour 2018 (soit 200.000 dollars). Là où il y a ahurissant conflit d’intérêt, eux proclament que ce sont là de beaux gages d’indépendance. Misère 2018 du «journalisme». Et dire… que ce Media dominant (qui veut en mettre plein la vue aujourd’hui avec une multitude d’articles évocateurs de Mai 68) s’étonne de rencontrer le mépris des Français et… les sarcasmes de leur troll préféré !!

*

Et… merci à Melclalex   pour le petit cadeau-photo qui illustre le présent billet.

6 Responses to Cette semaine j’ai lu Le Figaro.

  1. Robin HOOD dit :

    Quel courage!! moi je ne peux pas, je n’arrive pas ! Déjà lire la 1ere page sur un comptoir de présentation m’est difficile alors le reste.
    ça mériterait un week end de 2 jours en bord de mer pour se laver le cerveau au vent iodé 😉

  2. BiBi dit :

    @RobinHood

    Tu n’es pas le seul à me demander pour quelle raison je m’escrime régulièrement à lire les travaux de cette journaille. Peut-être y a t-il là du… masochisme ? 🙂 Et chacun sait qu’il y a de la jouissance là-dedans ! 🙂

    Mais plus profondément, côté politique, toujours interessant de voir non seulement la hierarchisation des Rédactions de ces torchons mais aussi de voir de quelle façon les « évènements » (qu’ils ont choisis et bien triés) sont parlés. Car dans ces « journaux », la censure est plus subtile qu’il y a une vingtaine, voire une trentaine d’années : de façon générale, on ne cache pas ce qui va mal mais on en parle de telle sorte que ça rejoint toujours les prises de position libérales. Ainsi on fait croire que de ne pas cacher l’info suffit à se dire pluraliste et à s’auto-proclamer fervent défenseur des Libertés.

    Prenons l’exemple de cette Police Libedesintox ( ou Decodeurs du Monde) : leurs brigadiers pensent qu’il leur suffit de dire combien ils touchent de FaceBook pour essayer de nous persuader qu’ils sont – malgré l’intolérable conflit d’intérêt – dans la défense des libertés et que leurs travaux d’Inquisition leur donnent le droit de brandir l’étendard de la Vérité.

    Mais les bibis en savent beaucoup et de longue date sur ces manoeuvres et ces manipulations !! :-))

  3. AgatheNRV dit :

    J’avais trouvé un article hilarant, il y a peu dans ce journal. Les salaires coûtaient de plus en plus cher
    Quant à Macron et sa mafia, on a touché le fond donc un bon coup de talon…

  4. Robert Spire dit :

    Il y a peu le site « Le promeneur » citait cette reflexion de John Berger: « La plupart des mots, aujourd’hui, sont salis par l’usage mensonger qu’en font les médias, les politiciens. Pas par les gens, je crois : c’est le pouvoir qui salit les mots. Les gens, de plus en plus, en réaction, disent “merde”. Et dans ce contexte, “merde”, c’est un mot très propre. »

    Bibi, tu sais dire joliment « merde » à ce monde culturel qui truquent les problèmes importants et châtre les discours des passionnés de l’Utopie tel Novalis qui, dans son « Encyclopédie » (fragment 1731) osait écrire: « Les organes mentaux sont les parties génitales – les parties sexuelles naturelles – du monde ». Notre monde a dévié de quelques centimètres…:-)

  5. BiBi dit :

    @RobertSpire
    Très belle citation de John Berger.Merci.
    Je la tweete aussitôt.

  6. Melclalex dit :

    Quel courage ! Lire Le Figaro et BRP la même semaine c’est au dessus de mes forces
    [Jolie photo ]

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *