L’Affaire Benalla : du pain béni pour le libéralisme.

Dessin Biz

L’Affaire Benalla est du pain béni pour le libéralisme car elle occulte le principal : la brutalité qui n’a cessé de s’amplifier depuis l’arrivée de son représentant sélectionné, placé, élu (sous couvert de «suffrage universel») par les sbires du Medef pour construire la France de demain. Longue opération de destruction, massacre des acquis enfin concrétisé (Loi Travail, Loi Retraite, Loi Chômage, Lois constitutionnelles, Lois Medias). On se rappellera encore ici des paroles (1) de Denis Kessler, n°2 du Medef, Président du Siècle, ce lieu où se cotoient Capitaines d’Industrie et grands dignitaires médiatiques. Elles donnent idée de la férocité de la logique macronienne.

Bon alors, cette Affaire ?

«L’affaire Benalla» tombe donc à pic : les Medias s’emballent, les réseaux sociaux sont en surchauffe. Ce qui domine dans les analyses que nous distillent les radios, c’est la réduction de ce scandale à des personnes, voire à des personnages. J’ai vu passer des images de Marlon Brando dans «Le Parrain». On me parle des super «caïds» dans les séries US, de drame, de suspense, de feuilleton, de rebondissements etc. Bref, d’une fiction hors-champ politico-économique.( e-comique aussi).

Quand je me penche sur les analyses du rôle de Macron, je vois de tout sauf qu’il est avant tout le représentant-type de la Génération Libérale avec sa vision civilisationnelle que je peux résumer par sa formule-exhortation aux petits jeunes, version Grandes Ecoles : «Il faut que les jeunes Français aient envie de devenir milliardaires». Compris ? Si vous n’êtes pas capables de devenir milliardaires, alors, normal, vous êtes des gens de rien et vous ne pouvez vous en prendre qu’à vous-mêmes. Bien sur, tout cela est insupportable et pour certains des «gens de rien», les voilà qui deviennent enragés : ils descendent dans les rues, ils redescendent dans les rues, ils envahissent les abords des hôpitaux, des Ehpad, des gares, des Universités, des lycées mais – hélas – pas tous ensemble – ne se rejoignant pas sur la Place Centrale.

Et si tout ce petit monde ne veut pas comprendre, ils vous envoient les Brigades policières qui tapent, tabassent à qui mieux mieux, aidées par les experts des Télés-à-jets-continus, les Journaleux et les Mandarins de toutes sortes. Bien entendu, j’entends déjà les protestations : j’exagère, je dessine un Monde de fiction etc.

Excusez, je laisse pérorer.

Le complément à la brutalité économique organisée par le Medef (n’oublions pas que le relais-Macron est sorti de l’ENA major en Economie et premier de la Classe bancaire) c’est la brutalité des violences policières. Où l’on revient à «l’affaire Benalla», couverture si chaude pour cacher le plus important. Mais, BiBi, cacher quoi, bon sang de bonsoir ? Cacher, gommer tout simplement les violences policières jamais vues depuis vingt ans à ce niveau. Un Top niveau où l’on crève un œil, fracasse les cranes, brûle les mains par grenades non autorisées et où l’on tue. (Soutien ici à la famille d’Adama Traoré).

Les passages télévisés en Commission ne veulent rien dire d’autre que «c’est une affaire Benalla», et «nous Policiers, qu’avons-nous à y voir ? Benalla ? Ce n’était pas un Policier mandaté. Jamais un membre de notre Confrérie irait jusqu’à mollester un citoyen. Qui peut soutenir une telle idée, hein ?» Aussi suis-je interloqué, voire effaré devant les formules de politesse et de remerciements envers les Policiers en tribune de cette Commission Parlementaire. Ai-je bien écouté ? Oui. «Je vous remercie de votre précision et de votre sincérité» (2) et gna gna gna. (Toute l’opposition hélas).

Qui irait ajouter dans ces auditions que, cette dernière année, Benalla a beaucoup appris en observant non pas le comportement des Manifestants mais celui de la Police casquée, armée, se faisant les muscles sur le Citoyen ? Et que, en voyant un Benalla au tabassage, rien d’original : on était dans l’ordinaire des manifestations. Manifestations dont – on l’aura remarqué – on ne retient que BlackBlocs contre Police, laissant dans le fin fond du grenier Radios-TV et Presse, les revendications légitimes qui montent depuis l’élection du Gourou.

C’est dans ce climat que les Medias s’en donnent à cœur joie. Satisfecit sur toute leurs lignes oubliant tous de féliciter les réflexes citoyens des vidéastes qui ont allumé leurs téléphones devant le rituel policier. Je vois passer le tweet de Jean-Michel Aphatie sans gêne qui se range sous les banderoles de la Grandeur de LA Presse (idem pour un tweet de Fabrice Arfi) alors que Le Monde (3) attend deux mois et demi pour s’interroger sur les exactions du Sieur Benalla et pour le repérer comme homme de main du Président.

Evidemment, on attendra en vain des applaudissements pour les réflexes des deux Citoyens, téléphone en main, qui ont mis en ligne les violences dès le premier mai ; on attendra en vain des félicitations pour les internautes-citoyens qui ont amplifié par leurs RT ce scandale.

«L’affaire Benalla» ne parle pas d’elle-même. Elle ne situe pas automatiquement les responsabilités. Les Officines Medias-Medef-Elysée construisent leur discours et l’imposent déjà : on se tait sur la violence économique et les lois d’airain qui s’ensuivent ; on fait silence les brutalités policières régulières qui sont là pour décourager et faire peur aux Citoyens («Restez donc chez vous ! Dehors, ça devient dangereux !»), on tait la logique structurelle libérale, celle qui a affamé les Grecs et qui a mis en place un gouvernement à forte coloration extrême-droite. Le FN est désormais dépassé. Il n’existe plus (sauf pour les échéances electorales) : c’est que ses idées sont entrées tranquilou dans les Ministères. C’est le Nouvel Esprit du Capitalisme. Féroce. Brutal.

Ici, en Autriche, en Italie.

On n’a pas fini de voir Benalla en écran.

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(1). «La liste des réformes ? C’est simple, prenez tout ce qui a été mis en place entre 1944 et 1952, sans exception. Elle est là. Il s’agit aujourd’hui de sortir de 1945, et de défaire méthodiquement le programme du Conseil national de la Résistance ! » Denis Kessler

(2). Le Préfet de Police Michel Delpuech et Alain Gibelin dégagent en touche pour gommer les violences policières. Soit en rappelant que Benalla n’est pas un policier, soit en répétant «ce sera à l’enquête judiciaire de le déterminer». Aujourd’hui, A. Gibelin revient sur ce qu’il avait dit sous serment (ou sous sermon elyséen!).

(3). Je me demande (hypothèse) si les journalistes du Monde (leur SRM – Société des Rédacteurs du Monde) n’auraient pas sorti l’Affaire Benalla pour se venger quelque peu de cet épisode où Macron, stagiaire au Monde en 2010, ne les avait pas rouler dans la farine lors de la négociation entre actionnaires. Lire ici la solidarité Macron-Minc et hautes instances mediatico-économiques. [Extrait du Monde Diplomatique] A moins que (autre hypothèse) : Police, Gendarmerie, Armée en aient un peu marre de Môssieur-Le-Président qui engage des moins-que-rien sans diplôme, vire un Général sans sommation et sans consultation etc. Autres hypothèses bienvenues.

8 Responses to L’Affaire Benalla : du pain béni pour le libéralisme.

  1. Robert Spire dit :

    Je ne sais pas où les journalistes, faussement décomplexés, vont chercher leur inspiration. Peut-être chez Marlier?
    Benalla manif,
    Benalla baston,
    Benalla montagne,
    Benalla foire,
    Benalla ferme,
    Benalla mer,
    Benalla et les marmitons, etc, etc…
    Cela énerve surtout les « gardiens de la paix » qui ont fait savoir par leur syndicat Alliance:  » L’image de la police est ternie par le comportement d’un individu extérieur aux forces de sécurité qui nous enlève de la bouche notre pain quotidien de brutalités, de désordre et d’injustices… » (Il est évident que je plaisante, n’est-il point?)

  2. AgatheNRV dit :

    Excellente analyse ! Je partage et félicite Robert pour son commentaire qui vaut son pesant de matraque …

  3. BiBi dit :

    @AgatheNRV
    Plutôt d’accord avec l’analyse de Jacques Chastaing sauf qu’il surestime beaucoup très beaucoup le poids de ce Front Social (Front Social qui ressemble plutôt à l’Arlésienne).

  4. AgatheNRV dit :

    Oui, là encore, je suis d’accord. Le front social ne peut exister, il rêve Chastaing tant il a été fabriqué des patrons de syndicats à la solde du pouvoir et la précarisation paralysante…

  5. Robert Spire dit :

    Dans la réalité ce « front social » est minoritaire et divisé. On l’a bien vu pendant les « Nuits debout ». Difficile de maitriser la question sociale dans toute ses problèmatiques, voir Accardo (De notre servitude involontaire) et dans le « brouillage identitaire » voir Nedjib Sidi Moussa (La fabrique du musulman).

  6. Robert Spire dit :

    Petite précision, je n’ai pas cité « Benalla campagne » car visiblement il n’y était pas:
    https://making-of.afp.com/les-agriculteurs-de-la-16e-etape

  7. […] transformera jamais en Boulanger-patissier« . Rappel: la mission 1ère de la presse et sur les blogs est la suivante: toujours rétablir les faits de A à M, c’est à dire, d’Alexandre à […]

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