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Thomas Legrand et Patrick Cohen : des victimes ?

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Dans les éditoriaux de Télérama, on avait déjà eu l’incroyable panégyrique de la rédactrice en chef de l’hebdo Fabienne Pascaud pour Roselyne Bachelot nouvellement nommée Ministre de la Culture.

Dans le numéro de cette semaine (Une avec titre : « France Inter dans le viseur de l’extrême-droite »), on a droit à la même glorification mais cette fois-ci, les louanges vont aux deux journalistes de la station de radio publique, Thomas Legrand et Patrick Cohen. Un mot sur ce titre de la Une où il est posé qu’il s’agit d’un PIEGE (on est dans le complot, n’est-ce pas !) INEXTRICABLE. Au fond, semblent dire les journalistes de Télérama, l’article qui va suivre ne sera pas plus éclairant. Cet épisode au Café est donc d’emblée « inextricable », impossible à analyser, comme serait impossible toute critique. Ici sont visées : celle de gauche et/ou celle d’Acrimed, posées implicitement comme invalides.

Rappelons les faits : les deux journalistes de France Inter rencontrent deux émissaires du Parti Socialiste dans un Café parisien et « parlent » politique. Ils sont enregistrés par la journaille d’un canard d’extrême-droite pro-Zemmour.

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Legrand et Cohen « évoquent« , « analysent » : une double manip langagière !

Face aux attaques, la défense du duo a soudé instantanément la Corporation (avec ahurissant appui de la SDJ de Radio France (1)). Hein, ben oui, quoi de plus normal pour eux de causer politique autour d’un café ? Abel Mestre du Monde nous prend de haut en disant que les deux journalistes ne font finalement que  » parler avec des sources de la situation électorale du pays !  » A L’Obs, François Reynaert a d’autres verbes stratégiques pour porter secours au duo. Ils « discutent, ils échangent des propos« . A Télérama, on va bien entendu dans le même sens avec les deux verbes, maître-mots de leur démonstration : le duo ne ferait… qu’ » EVOQUER  » la situation politique du moment (l.9 et 14) et… qu' » ANALYSER un centre-gauche » (l.18) ! Rajoutons que Patrick Cohen « SE BORNERAIT [pas plus !] à estimer le score » de Glucksmann ! (l.17)

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Tout le parti-pris de Télérama réside dans ces inflexions langagières, dans ces manipulations syntaxiques. Non, Legrand et Cohen ne font pas qu’ANALYSER ou EVOQUER ! Ils font plus. Ce n’est d’ailleurs pas seulement une aide, ils ne font pas qu’apporter leur concours aux deux socialistes Pierre Jouvet et Luc Broussy (qu’ils connaissent déjà). Ils font beaucoup plus : ils font partie intégrante de la stratégie politique du Parti Socialiste, ils peaufinent cette politique depuis leurs positions spécifiques et importantes dans l’espace médiatique. Ils œuvrent en faveur de Raphaël Glucksmann, pièce maitresse de leur stratégie du « front républicain/central » (2) (ou « bloc bourgeois« ). Thomas Legrand lui-même la formule dans ses propos en prônant une politique supposée gagnante qui s’appuie(rait) sur l’électorat majoritaire du « marais qui va du « centre-droit » au « centre-gauche » avec promotion de leur leader maximo, Raphaël Glucksmann (dans l’article, son nom n’est cité – en passant- qu’une seule fois !). Un héros qu’ils connaissent bien et qu’ils peuvent approcher tranquilou via Léa Salamé, leur collègue de France Inter. De cette stratégie du « marais« , absolument RIEN N’EST DIT, rapporté, développé dans l’article de Télérama.

Les deux adversaires visés : examen-BiBi.

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L’un est cette pauvre Rachida Dati, magouilleuse sarkozyste de longue date. C’est une adversaire dans un contexte électoral particulier où, à Paris, la gauche (de rupture) n’a aucune chance d’arriver première. Aussi, via cette réalité (LFI hors-concours), il est facile pour notre duo de tout œuvrer pour aider le candidat de « gauche » et tenter de dézinguer Dati. Pour s’attirer les faveurs de son (é)lectorat, l’hebdo consacre la quasi-totalité de son article à nous causer de l’égérie sarkozyste et de ses très vilains soutiens dans la Machine Bolloré.

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Le second adversaire ? Il n’est cité qu’une seule fois dans la phrase suivante : « la gauche mélenchoniste et la droite s’indignent aussi« . Remarquez que, dans cette phrase apparemment banale, le trio de journalistes met dans le même sac LFI et RN avec la tentative de persuader leur lectorat que le sens politique de l’indignation serait le même pour les deux partis. De l’indignation de cette gauche de rupture, il ne sera évidemment pas du tout du tout question alors qu’elle n’a absolument n’a rien à voir avec les anathèmes des braillards des radios et TV brunes. Quand Télérama cite Patrick Cohen pour le disculper) seuls sont rapportés ses attaques envers l’extrême-droite. Télérama SE TAIT, n’a pas une ligne pour rappeler que les deux compères dissertent, échafaudent, participent pleinement à la réalisation de leur plan Canfin-Ruffin-Glucksmann avec les deux clients du Café.

Omerta sur la critique de la Gauche critique.

Hé non ! Pas de paragraphe pour expliquer la critique de gauche ! On est dans Télérama, voyons ! On ne pourra pas non plus compter sur Charline Vanhoenacker pour amener une voix contraire à celle, par exemple, de sa patronne Sibyle Veil (3). L' »humoriste » essaie de nous convaincre que le licenciement de Guillaume Meurice se justifiait car « peut-être qu’il fallait mettre fin (censurer) à l’émission pour… éviter les attaques » de l’extrême-droite ! Guillaume Meurice appréciera !

Pour BiBi, on n’est pas loin de voir clairement quel est le point central de l’article. C’est l’Omerta sur les positions de la gauche critique avec, sous-entendue, la volonté de dézinguer « la gauche mélenchoniste » ravalée au même statut que celui de l’extrême-droite. Tous deux, déjà associés dans une « même » indignation, essaiment la « CONTAGION« , grossisent la « SUSPICION« , font pleuvoir ensemble les « INSULTES » sur les deux journalistes.

Le bla bla bla d’A.Van Reeth : « ni droite ni gauche ».

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Et pour finir, on a droit au couplet d’Adèle Van Reeth, la directrice de France Inter, qui reprend le thème central de Macron 2017 (« Ni de droite, ni de gauche« ). On nous ressert encore le désir de la station (via Cécile Pigalle, directrice de l’info sur Radio France) de ne s’en tenir qu’aux « vérités historiques« , aux « faits » et bla bla bla. Quand on écoute la gentillesse, la complaisance, le manque de travail des journalistes lors de la réception en studio des membres du RN en opposition à la hargne instantanée qu’ils ont envers les insoumis (écoutez SVP une minute Sophia Aram), l’auditeur(trice) est servi. Rappelons que s’en tenir aux « faits » masque ces opérations implicites, ces non-dits que sont le tri au préalable (voir celui, souvent insupportable, du 13h de France Inter de Jérôme Cadet !), la hiérarchie des infos, le classement en importance des faits et de LEURS INTERPRETATIONS. Sourions encore lorsque notre trio de Télérama fait intervenir la médiatrice de la Radio qui serait un juge hors idéologie, hors de tout parti-pris. Bref, une voix de… Vérité :-). Serait vraiment de mauvaise foi celui ou celle qui critiquerait ce hochet leurrant qu’est cette fonction de neutralité et d’objectivité.

Cécité et déni font le jeu de l’extrême-droite.

Cette cécité fait évidemment le jeu de l’extrême-droite et de ses chaînes de m. qui ne cessent de faire croire que Radio France serait de… gauche. Le punching-ball, qui contente à la fois les bruns et France Inter, se poursuivra. Ces pseudo-adversaires ont un point commun qu’Olivier Pérou a très bien résumé et que le trio de Télérama fait apparaître en pleine lumière justement via leur silence et leur déni. Il s’agit de tout faire pour que le « PS ne retourne pas dans les jupes de Jean-Luc Mélenchon« .

Une fois encore, sont esquivées les grandes questions sur l’état du journalisme d’aujourd’hui. Parmi ces questions, déposons ici l’opportune réflexion d’Alain Accardo sur l’habitus de ceux et celles (une cinquantaine de chiens de garde ou « moutons », c’est selon) qui sont embauchés et qui, aujourd’hui, squattent les postes, officiant au top, dans les médias dominants dominés par nos milliardaires.

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(1) Lire le billet d’Acrimed sur toutes ces positions corporatistes très très réactionnaires. (Extrait sur Thomas Legrand «dont l’honnêteté n’a jamais été remise en cause» (SNJ Radio France 6/09).

(2) Le front républicain (ou « bloc central ») est le désir d’unité entre les socialistes (voyez le nombre passé chez Macron depuis 2017)-les «écologistes» genre Canfin-Jadot-Tondelier, les Macronistes et le centre-droit avec des LR droite républicaine. Un seul ennemi : la gauche, celle de rupture. Sur leur lancée, il s’agit de se faire passer pour une vraie gauche (celle d’un Hollande, ennemi de la Finance, accueillant le sinistre Macron en 2014 dans son gouvernement).

(3) On n’a pas entendu une SEULE protestation du SNJ (et autres) sur ce tweet déposé sur Twitter par la directrice de Radio France qui encensait la députée macroniste, la très droitiste Nathalie Loiseau qualifiée de… « FEMME D’EXCEPTION » !

Ils ont choisi la défaite 2022.

Ils ? Qui ça, « ils » ? Pas de tergiversations : il s’agit du Bon Bourgeois du Bloc Bourgeois, (B.B.B.B) de ce «socialiste moderne» comme l’écrit ironiquement Frédéric Lordon, dans son dernier billet.

Comment reconnaître un B.B.B.B.?

«Depuis quarante ans, on lui a répété, envers et contre toute évidence, que le parti socialiste était «de gauche». C’est en ce point qu’on mesure la difficulté de défaire les investissements imaginaires dans une identité politique. Une fois qu’on s’est dit de gauche à la manière PS, et qu’on y a été confirmé répétitivement par France Inter, ni les traités européens successifs, ni les privatisations, ni le CICE, ni les démolitions du code du travail, ni finalement aucun des alignements sur les desiderata du capital ne peuvent conduire à quelque reprise de soi politique : on est de gauche, c’est évident».  Frédéric Lordon.

Il est des nôtres ? Repérages.

Ce Bourgeois, nous le connaissons tous, mais trop souvent, nous faisons comme s’il n’avait guère d’importance et de responsabilité dans le désastre présent. Nous haussons les épaules, nous laissons courir, nous le laissons discourir. Il est une de nos bonnes connaissances, un type bien qui est régulièrement présent aux réunions des Parents d’élèves, un type honorable qui dit que Blanquer est insupportable mais qu’il verrait bien Luc Ferry à sa place «à tout prendre, hein ?», il fait ses courses à la supérette, sa femme est au Club de Marche, ils ont la soixantaine approchante. Lui, il avoue que Michel Onfray a dit de jolies choses dont «la Gauche devrait s’inspirer», il dit encore qu’au réveillon du Jour de l’An, il espère manger au restaurant car l’histoire du Covid («tous vaccinés, on y arrivera») sera bientôt du passé. («Tous comptes faits, Macron a bien mené son affaire»)

Quand on lui demande si le confinement a eu des effets négatifs. « Non financièrement nos fins de mois ont été assurées. C’est surprenant mais rien de changé. Pour nous, c’est comme avant».

Ne pas effacer l’historique (de son habitus politique).

En 1981, notre B.B.B.B sautait dans la fontaine des Cordeliers à Lyon pour fêter l’ère Mitterrand. Il a conservé la Une du Libération tout rose d’alors. Qu’en 1983, Mitterrand ait finalement mis à jour ce qu’il avait caché en manoeuvrant habilement. «Je clame Vive le Programme Commun» mais je  fonce dans le libéralisme-façon-Bernard-Tapie » ne lui a jamais posé problème. Nous étions en pleine fascination des Nineties. Les entreprises étaient au Top, le miel de l’argent coulait à flots, le CAC 40 montait, les petites économies placées en bourse lui avaient fait gagner 2%. Même Chirac et ses pommes, Bernadette et ses pièces jaunes, c’était sympa. Sa conscience politique aiguë lui disait que la Cohabitation (on ne disait pas «Collaboration») c’était finalement une bascule nécessaire dans «L’Epoque Moderne». Il était toujours de Gauche bien sûr car cette dernière s’était modernisée, il continuait à soutenir le combat avec les Valls, Elkhomry, le futur Macron, Montebourg, Batho et Taubira. Plus de danger avec les Communistes car le Parti de Robert Hue et de Pierre Laurent s’était modernisé, lui aussi, dans le bon sens. C’est sûr : on allait rester la 5ème puissance mondiale comme tous les économistes l’écrivaient. Là-dessus, aucun doute puisque Terra Nova lui envoyait régulièrement ses analyses impeccables. Et il rajoutait : « A l’Institut Montaigne aussi, les études sont vraiment très sérieuses« .

Et puis, reste le souvenir d’avril 2002.

Un Jospin à la dérive et un Le Pen au second tour. « Hein ? Quoi ? Catastrophe ! Les gueux sont entrés dans la Ville. Dieu du Ciel, des français manipulés, inconscients, enfoirés sont venus foutre la merde ! Ah l’esprit français, parlez moi z-en ! On a le pire de l’Esprit français, jamais content, rouspéteur. L’esprit de 1940. Populo avachi ». La forme contestataire – via les taux d’abstention majoritaire qui vont suivre – sont ignorés. Et le Non au Référendum 2005 sera, lui aussi, vite dénié, vite refoulé, vite contourné politiquement.

Va t-il « se défaire de ses investissements imaginaires ? » (Lordon)

Si l’on était en cours avec Bourdieu, on dirait : «habitus incorporé». Si l’on a souvenance de certains écrits d’Althusser, on retiendra ceci :

« Pour passer sur les positions de classe prolétarienne, l’instinct de classe a seulement besoin d’être éduqué. En revanche, l’instinct de classe des petits bourgeois et donc des intellectuels doit être révolutionné ». Pas pour demain cette Révolution.

Pour notre B.B.B.B et les Droites, le Mal, c’est le même.

Les déclassés, les antivax, les dans-la-rue-chaque-semaine, les islamo-gauchistes, les gilets-jaunes-trop-jaunes, voilà le Mal. Oh, le B.B.B.B garde encore un restant d’humanisme («Il faut les aider et rester quand-même bienveillant. C’est qu’on est quand-même en République ») mais c’est pour rajouter «Mais hélas, il faut bien le dire, ils sont «bêtes», « abrutis », «irrécupérables» ou encore «Oui, il faut travailler plus, que voulez-vous, c’est la mondialisation. Le monde a changé». Pire encore : «Filous et profiteurs, oui quand-même, c’est un peu vrai et, avouons-le, ils sont quelque peu antisémites. J’ai vu une pancarte à la télé (il hausse le ton) « c’est in-to-lé-ra-ble »).

Chaque matin, le B.B.B.B écoute «France Inter».

Mais pas uniquement. Il sait d’avance qu’il partage les opinions inamovibles de L’Obs, de Liberation (qu’il achète assez régulièrement), du Monde (A son travail, le boss laisse traîner des numéros), de Marianne le Mag (« Super leurs Unes ! »). Madame, elle, s’est réabonnée à Télérama. Hier elle s’est ralliée à l’avis de Fabienne Pascaud, l’éditorialiste qui garde de l’espoir pour la Culture avec la nomination de Roselyne Bachelot.

Le B.B.B.B est un inconditionnel de France Inter. Certes, il n’était pas toujours d’accord avec Bernard Guetta mais «Thomas Legrand et Dominique Seux qui l’ont remplacé disent de belles choses». Il ignore évidemment ce qu’avait relevé Fakir dans un ancien numéro…

Liberation et Politiquemedia.

Et, hier, il est tombé sur cet article de Liberation qui a commandé et approuvé le travail de cet Officine (PolitiqueMedia probablement très influente) sur lequel il faut s’arrêter. Un article qui dit tout du Choix de la Défaite sous des dehors neutres, objectifs.

Un de mes tweets a suffi à repérer l’esbrouffe, c’est-à-dire les catégorisations acceptées et imposées par le quotidien favori de «gauche» de notre B.B.B.B. Des catégorisations d’évidence of course.

Notre Bourgeois gentilhomme se dit toujours de gauche.

Il est persuadé que sa version Droite-Gauche existe toujours. «En 2017, c’est vrai, il fallait bien s’y résoudre : entre le totalitarisme et Macron, y avait pas à hésiter». Et notre B.B.B.B n’a pas hésité. D’ailleurs, il n’hésite jamais. Il n’hésite pas car – contrairement aux gens de l’Ultra-Extrême-Gauche (un concept trouvé à Liberation et psalmodié par les Fabienne Sintès, Demorand, Salame, Duvic, Dely, Achilli and Co) – ,lui il a réfléchi, il a pris en compte les bouleversements mondiaux, les Chinois, les pays émergents, les Talibans, Bachar, Bolsonaro, Poutine et ses pipe-lines mais aussi les scandaleux paradis fiscaux et les méfaits du «Grand Capital» (il rit en disant ces deux mots façon Georges Marchais). Et donc, y a pas à hésiter. Il sait que la Droite (LR, RN) continue à être très vilaine. Ses opinions se fondent exclusivement dans son horreur du populisme. Horreur de la droite dure. De l’extrême-droite, de tous ces abrutis qu’on manipule. Mais, point nodal tout aussi incontournable : pour lui, Macron, ce n’est ni la Droite, ni des relents d’extrême-droite. «Faudrait pas exagérer, hein ?»

Parfois – mais il évacue vite – il se dit que certains, à droite, n’ont pas tout à fait tort. Il y trouve des gens intelligents qui disent des choses sensées sur l’islamo-gauchisme, sur le migrant, sur les frontières insuffisamment protégées, sur l’Europe (qui s’affaiblit à cause des râleurs), sur les banlieuesAh oui, les banlieues») et les jeunes qui traînent dans les rues à point d’heure. Mais de la violence symbolique et réelle de la police castanerienne et darminesque, il ne voit rien. Il anônne toujours «je suis de gauche». Des preuves ? Il est révulsé par les millions que va gagner Messi, par les viols, par Darmanin et les femmes («Je verrais bien un retour de Cazeneuve, il était bien»), il maudit le Texas qui a interdit d’avorter, il se désole du Climat et de la dégradation de notre environnement («Perso, j’ai appris à fermer les robinets »). Il est plus-que-jamais pour la solidarité («j’amène mes vieux habits à Emmaüs»).

L’Esprit de Communauté comme pilier.

Mais ces positions-là (acceptons-les) ne le feraient pas tenir debout longtemps si elles n’étaient que personnelles. Si son for intérieur reste indestructible et inébranlable dans ses fondations imaginaires, c’est qu’il peut compter à tout moment sur l’Esprit de Communauté. Une Communauté qui existe car elle écoute – comme lui – France Inter et France Info, elle lit Le Monde, L’Obs, Marianne etc. Il s’offusquerait si on lui disait que sa Communauté n’est Une et n’existe que parce qu’elle pointe les boucs emissaires, qu’elle ne tient debout que grace à ces rejets, qu’elle applaudit fièrement Lallement etc. Un Esprit de Communauté dont les piliers inavoués, refoulés, non-dits sont : la Peur animale de Vivre tous ensemble, l’horreur du Conflit, la Haine de Ceux-Qui-Résistent. Et ceux qui résistent et dont notre B.B.B.B ne veut pas appartiennent à l’extrême. Enfin à «l’extrême-gauche» catégorisé ainsi par Liberation.

Cette Propagande-Médias rassure notre BBBB. Elle lui dit : «En bon Français qui votera en mai 2022, la bonne Communauté nationale que tu souhaites ne peut pas se soumettre à un extrême, être dirigé par lui, hein ?» Comment s’étonner dès lors que notre B.B.B.B reste indécrottablement accroché à sa propre vision du Monde : «Oui, oui, oui : je suis toujours à gauche».

Ils ont choisi la défaite 2022.

De cette gauche présente à 4% dans les micros des radios publiques, nos BBBB n’en veulent pas. Mélenchon est leur homme à abattre. Je les vois tous fiers de l’avoir écarté en mai prochain. Ce qui change chez nos B.B.B.B, pour aujourd’hui et pour demain, c’est qu’ils disent désormais ouvertement vers qui, vers quoi, prioritairement, ils écument de rage.

Et pendant tout ce temps, l’ouragan version MEDEF continuera de tout détruire. Et foin de «défaite», nos B.B.B.B se consoleront avec une promotion ministérielle post-2022 (un Enthoven, un Finkielkraut, un Ferry, une Pécresse, un Barnier augmentés de quelques crétins de la Société Civile). Soupçon de culpabilité vite réprimé, j’entends déjà le B.B.B.B d’â côté me dire : «Bah ! Il fallait bien en passer par là». Et puis, dans une accolade : «Dis-moi, tu as écouté la Matinale de France Inter sans Léa Salame? Quand-même bien… non ? »

La nouvelle jeunesse de Roselyne Bachelot.

Les Agences de Com macronistes nous prennent vraiment pour des imbéciles. Ces Agences pourtant bien rôdées et – comme toujours -payées à prix d’or, nous font passer une photo d’une Roselyne Bachelot en plein vol, en plein travail. Analyse-BiBi.

Je suis donc tombé ce week-end sur une photo toute récente de Roselyne Bachelot, nouvelle Ministre de la Culture. La Star sarko-macroniste compatible, la Nunuche des Télés-réalités et des Télés de la Honte est dans l’avion qui la mène en Province, cette Province secouée par le Covid19 et les annulations de festivals culturels en tous genres. Madame Bachelot est en place assise près du hublot, sérieuse, épluchant un dossier de la plus haute importance. Vient à passer un photographe. On ne sait pourquoi, il est là. Oui, vraiment un hasard. On a déjà repéré le gros gros dossier qu’elle a refermé. Sérieuse, pensive, réfléchie, elle est sur son téléphone, nous faisant croire qu’elle est en conversation importante avec un important correspondant.

Une photo dont l’effet de Réel le plus notable est paradoxal : malgré sa position immobile, Roselyne Bachelot est dans le bougisme. Comme son Maitre Emmanuel.

Si elle est là c’est qu’elle n’est pas à son bureau ministériel : elle bouge, elle se remue le popotin (comme le Sarkozy de 2007-2012). Elle va là où la France de la Culture en difficulté l’appelle. Elle y va, elle va au charbon. Pas comme ces autres Ministres à la Cool. Elle se veut au centre de la Politique, elle s’offre comme Star du nouveau gouvernement sur un « nouveau chemin». Et ce chemin nouveau la mène au-dessus de la France. Ne nous étonnons donc pas de la voir dominer le paysage en contrebas : c’est la France profonde, cette France qui… bouge elle aussi et qu’il s’agit aussi de calmer.

Bah, me direz-vous ! c’est une photo somme toute banale. Pas vraiment besoin d’en faire un billet.

Pourtant.

Rappelons-nous d’où vient Roselyne Bachelot. Dans son parcours politique, elle a beaucoup à se faire pardonner pour sa participation active à la destruction des Services Publics hospitaliers. Bévues nombreuses dont celle sur les vaccins. Souvenons-nous aussi de ses images plus récentes : des présences sur tous les écrans qui nous ont fait croire à une supposée reconversion en (piètre) Clown. Jusqu’à récemment, Roselyne Bachelot était un bon plan pour les Medias. Invitée qu’elle était dans les émissions-dégueulis aux fortes audiences. Et je passe et repasse chez Hanouna. Et je m’éclate chez les grandes gueules des Grosses Têtes etc.

Impossible de comprendre l’une sans la mettre en rapport avec l’autre…

Alors on commence à percevoir la Manœuvre derrière la présence de cette photo dégotée sur les réseaux sociaux. Roselyne Bachelot est là, attentionnée, penchée sur ses dossiers, indifférente au (à la) photographe, pour gommer ses facéties honteuses antérieures. Elle est là pour faire oublier qu’une Ministre de la Culture (un Ministère-phare de la Société Française dans les couches sociales aisées) ne doit pas déconner : ça doit être du sérieux. Hé, c’est qu’avec Malraux, c’est qu’avec Jack Lang, ça vous classe ! Alors essayons de les égaler, un tantinet, hein ?

Alors, oui, les Agences de Com turbinent à plein : elles font tout pour balayer ces honteuses apparitions dans les Télés de la Honte, tout pour gommer son image de cul-cul la praline, de rigolote et de nunuche. Il faut vite vite vite les remplacer par d’autres… images. Une photo de Madame très posée dans l’avion, c’est parfait. Sérieuse qu’elle doit être dorénavant. Les Agences vont nous marteler : Madame Bachelot est réfléchie, elle bosse, elle va bosser pour le bien de la France, de notre Culture.

De plus, oh la la, ça tombe bien, dans cette même semaine, Fabienne Pascaud, directrice de rédaction du très culturel Télérama (l’alibi culculturel de Niel) sort un article dithyrambique sur Madame. D’une incroyable «vérité». Des éloges d’une rare hauteur. Quelle chance (provoquée, of course). Mais lisez plutôt : Madame veut… sauver ces pauvres artistes !

Super, non ? La propagande a magnifiquement débuté ! Merci les Agences ! Que tout ça continue encore un peu et, hop hop, en septembre, toutes les singeries de Madame seront oubliées. Finie cette image de Roselyne Bachelot baisant le Q d’une concurrente sur CNews. Finies les blagues de Q sur RMC.

73 ans ! Madame Bachelot va retrouver une nouvelle jeunesse. Parfaitement raccord avec Macron, son odieux Président qui lui aussi, se refait faire le portrait en clamant qu’il s’avance sur… un nouveau chemin.