Lectures du moment : entre douleur et espérance.

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UN LIVRE : CONTRE LA BARBARIE de Klaus MANN (1925-1948).

UN ARTICLE A NE PAS MANQUER. (Frédéric LORDON).

UNE REVUE EN MARGE A SOUTENIR : «FAKIR».

Mon vieux professeur d’histoire ne cessa de nous répéter de ne jamais oublier cette date du 30 janvier 1933, date à laquelle Hitler devint chancelier. Le 25 février, le Parti Communiste fut dissous à la suite de l’incendie du Reichstag. Un mois plus tard, les députés allemands votèrent les pleins pouvoirs à Hitler pour une durée de 4 ans.

Klaus Mann, fils de Thomas Mann, parti faire du ski en Suisse rentra à Munich le 11 mars. Deux jours plus tard, il quittait l’Allemagne n’y revenant que 12 ans après. Il eut cette lucidité toute politique pour mener son combat d’exilé.

«Celui qui adopte une attitude ambiguë, écrivait-il dans ses lettres contre la barbarie nazie, ne sera plus jamais des nôtres». Il fustigea les intellectuels qui appelèrent à rentrer «dans la sainte sphère de l’éloignement béni du monde» – dixit un prélat catholique. Il exhorta le poète à prendre position car «il n’est pas un être éthéré, affranchi de tout devoir et de toute pesanteur», il regretta que pour les prolétaires, – comme en 1914 – les «slogans nationalistes soient plus attractifs que la lutte des classes», il tenta sans complaisance de raisonner le jeune allemand passionné qui s’offrait à ce Pouvoir qui demandait le «sacrifice de soi».

poète

Avec les «émigrés» dont il fut une partie active, il ne cessa de lutter contre la propagande allemande qui distillait des contre-vérités, faisant croire à son bon peuple que les émigrés «se prélassaient dans un luxe immoral dans les stations balnéaires en excitant les esprits à la guerre contre leur propre pays».

Klaus Mann interpella intellectuels (écrivains connus – comme Stefan Zweig et Gottfried Benn – et moins connus, journalistes) et constata que beaucoup de sous-fifres, écrivaillons avides de gloire, se mirent au service d’Hitler et du directeur de la Culture, Goebbels (non pas sous l’effet de la contrainte mais par lâcheté, par soumission totale désirée, par désir éperdu de gloriole). Il maudit les 88 écrivains qui acceptèrent de signer une proclamation de soumission au régime sous la forme d’un «serment de fidélité inconditionnelle».

Klaus Mann

Sa réflexion porta aussi sur cette pseudo-logique des Nazis, logique de l’illogisme absolu («Ce qu’ils beuglent le soir a déjà été démenti au matin suivant»). Un jour il est immoral et interdit aux femmes de fumer. Le lendemain, l’industrie l’imposant, il sera autorisé aux mêmes femmes de fumer. («Au nom du pouvoir, ils sont prêts à trahir toutes les théories dont ils se servent pour arriver au sommet. Voilà pourquoi il ne vaut pas la peine de discuter avec eux…» Décembre 1933.)

C’est la confusion qu’ils sèment constamment – comme ici, dans la France d’aujourd’hui – faisant mine de soutenir Syriza en Grèce, se drapant dans des vocables de pseudo-gauche etc. – Et lorsque la confusion ne suffit pas, c’est la force. «La confusion et la force se complètent. Elles s’accordent» (Novembre 1933).

Après la guerre, isolé, revenant en Allemagne où il émet de sérieux doutes sur la dénazification, il finit par se suicider en 1949 à Cannes où il effectuait une de ses nombreuses cures de désintoxication. Il avait 43 ans.

UN ARTICLE A NE PAS MANQUER.

C’est celui de Frédéric Lordon qui revient sur les événements grecs dans un billet de haute tenue. On retiendra ces passages sur les Chiens de Garde qui n’ont cessé d’aboyer jusqu’à ne plus en pouvoir (mais ils peuvent encore et encore) : Jean Quatremer et Arnaud LeParmentier. Mais là n’est pas le plus important. Lordon ne se leurre pas sur l’aboutissement de cette crise.

«Il ne faut donc pas se tromper dans l’appréciation de la portée de l’événement oχi. Il est des plus que douteux que le gouvernement Syriza obtienne davantage que des concessions marginales (…) Mais ça n’est pas ainsi qu’il faut juger de l’événement, car c’est un ébranlement d’une tout autre sorte qui s’est produit dimanche 5 juillet. L’ébranlement d’un peuple entier entré en rébellion contre les institutions européennes».

Et lucide, il finit par ces nobles pensées : «Toutes les fibres commencent déjà à craquer. Maintenant il faut pousser, pousser c’est-à-dire refaire de la politique intensément puisque c’est la chose dont ils ignorent tout et que c’est par elle qu’on les renversera».

UNE REVUE EN MARGE A SOUTENIR.

Et c’est vrai que ce superbe billet de Lordon dans le Monde Diplomatique fait écho à cet autre billet-éditorial du dernier numéro de Fakir. Je dépose en petite vignette cette reflexion sur la façon d’aborder le combat politique/idéologique, réflexion sur laquelle seuls les gens de Gauche (française) pourraient justement se pencher pour en débattre :

Fakir

Voilà, voilà. Ainsi vont, ainsi flottent les pensées-BiBi en ces Temps de douleurs et d’espérance.

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