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Elle me disait… (15)

noell oszvald  bibi

« Je ne sais plus ce que je dis ». C’est par ces mots déposés que notre quinzième rencontre a débutée. Non qu’Elle s’en vantait pour faire l’intéressante. Non qu’Elle commençait lucidement à délirer… Ce n’était pas non plus un constat froid, distancié. «Je ne sais plus ce que je dis» ajouta t-elle une seconde fois.

Et tout advint ensuite. Tout, entrecoupé de silences, de sourires (qui n’en étaient surement pas) : phrases lâchées dans les brumes, en plein soleil, sur les bords des grands fleuves ou en enjambant les ruisseaux des montagnes (ce jour-là, nous étions remontés aux sources). Il était naturellement hors de question d’en prendre note sur le vif. Je m’y étais résigné.

C’est donc sur des souvenirs brouillardeux que je les ai reconstruites et les ai retranscrites ici. Parfois, il me semble même que j’ai usurpé sa place d’énonciatrice. Honteux, je suis presque persuadé – à mon corps défendant – que tout cela vient de moi. Je pèse longuement le pour, longuement le contre. L’a-t-elle dit ? L’ai-je ainsi écoutée ? Je ne sais plus.

J’avoue alors que très souvent, trop souvent, fébrile à mon tour, je me surprends à murmurer, à me répéter : «Je ne sais plus, je ne sais plus ce que j’écris».

Au final, restent ces vingt fois. Les voici donc…

Paroles déplacées.

Vous relisez. Vous retombez en arrêt devant des phrases ou des paragraphes que vous aviez oubliés. Vous relisez et heureusement, ces phrases, ces paragraphes tiennent dans ce geste ancien et bienvenu de les avoir remarqués en les marquant d’un trait de stylo, d’un sur-lignage fluo. Ils réapparaissent ainsi comme des fantômes vivants.

Hommage vibrant à ceux qui ont su mieux que BiBi écrire ce que BiBi – et tant d’autres – pensent… sans trop le savoir.

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Ce paragraphe d’Yves Prigent :

«J’aime bien le mot de «parole déplacée», parce qu’il a un double