Freud, Mann and a Woman.

femme au violon BiBi

Dans le livre (« Freud avec les écrivains », Editions Gallimard), Edmundo Gomez et Jean-Bertrand Pontalis font l’inventaire des écrivains qui ont marqué durablement le fondateur de la psychanalyse. Ouvrage fécond qui, chapitre par chapitre, fait lien entre des auteurs si divers que Shakespeare (Number One), Stefan Zweig, Romain Rolland, Jensen, Schnitzler, Schiller, Goethe, Hoffmann, Heine et… Thomas Mann avec le Maestro viennois.

Il apparaît que les deux écrivains qui résistèrent le plus au Maître de Vienne furent les plus radicaux… Deux auteurs qui connurent une vie dissolue, à cent lieues de la vie rangée du Viennois : Nietzsche (dont Freud écarta sa lecture de peur d’y trouver l’Épouvante) et Dostoïevski (sur lequel, dans une lettre à Peter Gast, Nietzsche écrivit  : « Connaissez-vous Dostoïevski ? : c’est mon psychologue avec qui « je me comprends»). Ces résistances, qui cachent une admiration profonde, grandissent Freud car ce dernier trouva en chacun d’eux des forces directrices pour ses travaux et ses avancées décisives.

Courageux Freud qui reconnaissait là sa dette à ses complices contemporains en écrivant « modestement» : « Les écrivains nous devancent de beaucoup, nous autres, hommes ordinaires (!), notamment en matière de psychologie parce qu’ils puisent à des sources que nous n’avons pas encore explorées par la science».

Freud a dix-neuf ans de plus que Thomas Mann. Ils se rencontrèrent à plusieurs reprises dont la première fois en pleine ascension d’Hitler (mars 1932). La deuxième rencontre eut lieu aussi à Vienne en juin 1936. Thomas Mann vint lire à Freud le discours qu’il prononça le 8 mai 1936 pour son 80ème anniversaire (« Freud et son avenir»). Dans son chapitre, Edmundo Gomez Mango s’attarde sur cette lueur crépusculaire, sur ce mirage de clarté dans la nuit brune qui s’annonce via un court extrait du Docteur Faustus.

Clarté : nécessaire illusion, increvable illusion battue en brèche par les évènements d’alors qui portèrent Hitler au pouvoir. Dans ce drame humain évoqué ici (mais qui est de tous temps) tout se passe avec – en toile de fond – un son encore en suspens dans le silence, avec aussi la figure si érotique du violoncelle (associée ici par moi 🙂 au nu féminin).

Est résumé en ces dix magnifiques lignes le Drame humain, trop humain, Drame à l’espérance fébrile, tenue, maintenue contre vents mauvais et océans déchaînés.

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Thomas Mann

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