Grèce 1. Premiers pas à Thessalonique.

En ces temps hors saison d’été, Thessalonique appartient enfin aux Grecs. Le flux des touristes est moins fort qu’à Athènes ou que dans les Cyclades. Cette raison suffit à en conseiller la visite. Arpenter la rue Egnatia. S’arrêter à Ladadika. Gagner à pied les hauteurs de la ville. Pour le panorama à 240 degrés. Pour les rencontres fortuites aussi.

Elle me dit : «Autrefois, enfant et jeune fille, ma mère partait à pied de là-haut pour les écoles d’en-bas». Tout là-haut, un dédale jusqu’aux fortifications byzantines, avec ses maisonnettes grisâtres, ses petits commerces de détail, ses petites tavernes-épiceries où tu bois de la bière allemande (fraîche). Une vie qu’on devine rude, sans concessions, moins trépidante qu’en bas…

Avec la sortie hors de cette insupportable France macronienne, on espère trouver une parenthèse, un peu de brise parfumée, un bain bienfaisant dans un langage inconnu, on croit avoir du répit, n’avoir plus à entendre parler ces salopards d’En Marche mais le Réel (c’est-à-dire : le Libéralisme, l’Europe des Cannibales) ne vous lâche pas si aisément. Il vous retrouve et vous happe une nouvelle fois.

Mais, en contre-point, ce samedi et dimanche 8 et 9 septembre, Thessaloniki, deuxième ville de Grèce, a des airs de révolte.

En descente de la ville du Haut, tu croises une troupe de journalistes et tu t’interroges sur ces caméras sur pied, prêtes à fonctionner. C’est Tsipras qui arrive, voiture noire se rendant en visite à la Municipalité de la Ville.

Tsipras dont tu as vu la tête sur les affiches collées par les opposants de gauche. Tsipras qui vient chaque année pour l’ouverture de la Foire Internationale (FIT). Cette année, c’est la 83 ème édition. Invité d’honneur : les USA, avec Wilbur Ross, Ministre du Commerce (les Télés évitent de prononcer le nom de Trump) accompagné de toute une kyrielle d’entrepreneurs, hommes d’affaires cravatés, chemise blanche, veston bleu nuit. C’est qu’il ne faut pas laisser Chinois et Russes envahir la péninsule grecque.

Faut faire gaffe à qui tu parles : policiers et brigades anti-émeutes sont en nombre mais aussi probablement les agents de la CIA et du FBI pourvus de petits écouteurs noirs. Deux ou trois navires de guerre sont proches du front de mer. Wilbur Ross va inaugurer l’ouverture de la Foire avec son discours de coopération-domination. Pauvres grecs : ils ont eu Merkel. Ils vont avoir les lois d’airain de Trump.

Tsipras remerciera Wilbur. Des câlins aux Ricains jusqu’au bout de la nuit avec un long, très long discours télévisé, discours politique pleins de promesses et d’auto-justifications sur l’austérité imposée à son pays. Sur les écrans du café, écrans fixés dans la rue à côté de ma table, beaucoup de passants mettent la main sur le visage du Traitre en signe de protestation. Les affiches et tags l’appellent « L’Indésirable ». Pas loin d’être aussi populaire que Valls chez nous.

*

Les Grecs ne restent pas les bras croisés. Mécontents, ils sont descendus dans la rue. Une première manifestation de droite et d’extrême-droite. A ce sujet, contrairement au journaliste de Libération qui voit… 16000 manifestants (!) sur le bord de mer et aux abords de l’Helexpo (où se tient la Foire avec ses prestigieux invités), il y a plutôt 3 à 4000 personnes où se mêlent nationalistes et fachos d’Aube Dorée. Une heure avant, sur l’avenue Mela Pavlou, deux Mercédès se sont arrêtées au feu et ont ouvert leurs coffres : je les vois sortir matraques, masques, cagoules, casques à la Benalla. Toute la nuit, ces Enfoirés feront brûler des poubelles dans les avenues et carrefours autour de la Tour Blanche. Les fachos ont profité du sentiment nationaliste pour s’allier avec des manifestants pro-grecs qui ne cessent de crier «La Macédoine est grecque» «Tsipras, traitre», slogans qui dénoncent l’accord entre Athènes et Skopje qui ont fondé la «République de Macédoine du Nord», ex-province yougoslave.

Plus haut dans la ville, les rues menant à Helexpo sont bouclées mais tout proche de l’Arche de Galeries, se tient une autre manifestation, celle de la gauche avec le Parti Communiste (KKE), les Antifas, Anarchistes, Syndicalistes et autres Paysans Macédoniens. Ils sont quasiment en même nombre qu’en bas.(Entre 3 à 4000 personnes).

Quatre jours où flottent sur la Ville les odeurs d’une Europe libérale, une Europe qui continue – avec son alibi de gauche, Tsipras et sa Foire Internationale – à mettre la Grèce sous l’eau.

Et le lendemain, lundi 10, gare centrale des bus, ce sera direction les Météores. (A suivre).

Traduction (Photo du haut) : «Aucune maison entre les mains des banquiers».(Référence aux ventes aux enchères de maisons achetées à crédit).

Traduction (Photo du bas) : «Renforçons les syndicats. Avançons avec. Luttons pour que la ploutocratie paie la crise. Emplois complets et stables pour tous. Salaire minimum à 751 euros. Des pensions à 600 euros. Allocation à tous les chomeurs de 600 euros».

One Response to Grèce 1. Premiers pas à Thessalonique.

  1. AgatheNRV dit :

    Voilà Tsipras a nassé les voix de gauche ce qui a permis ce résultat, nos leaders ou animaux politiques piègent ainsi ces réserves de voix. On peut s’intéresser aux échanges qu’ils soient cordiaux ou théâtralisés dans l’agressivité, le résultat est que le système ne laisse rien au hasard…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *