Tag Archives: Françoise Lebrun

Les lunettes noires de Jean-Pierre Léaud.

Les lunettes de Jean-Pierre Léaud

Ce lundi sur Arte, on passait le grand film de Jean Eustache («La Maman et la Putain»). Je l’avais déjà enregistré en VHS  lors d’un dernier et lointain passage à la télévision. Ce qu’il y a de fort dans la re-vision d’un film qu’on a aimé c’est le trouble vers lequel il nous renvoie, trouble différent aux différents âges auxquels on le voit. Trouble d’adolescent en 1972 à l’Olympic-Entrepôt, troubles d’adultes plus tard. Et hier soir encore.

C’est évidement le privilège des films singuliers que d’être pluriel, que de se démultiplier, que de nous remuer ainsi et autant de fois. Pluralité et bouleversements inattendus de nos regards qui confirment la phrase rimbaldienne : «Je est un autre».

Un Hommage et des Images.

Bernard Cerf est directeur du Festival des cinémas différents et expérimentaux de Paris. Il  est par ailleurs réalisateur et producteur (Les productions aléatoires). Il est toujours vivant mais BiBi ne le connaît pas du tout.

Katerina Golubeva était actrice. Elle avait tourné avec Léo Carax, Bruno Dumont, Claire Denis. Elle est décédée le 14 août à Paris. BiBi ne la connaissait pas non plus, ne l’avait jamais vue.

Mais c’est la lettre de Bernard Cerf au Monde, lettre parlant de Katerina Golubeva qui a touché BiBi.

«Elle [KG] habitait près de chez moi. La première fois que je la croisai, je me demandai si c’était elle. Une amie me confirma qu’elle habitait là. Puis je la revis au Parc des Buttes-Chaumont avec sa fille. Elle avait ce visage blanc d’une beauté à la fois pure et mélancolique qui s’éclaire et mélange douceur et folie potentielle.

Je la recroisai. Lui parler n’aurait rien changé, mais j’étais amoureux d’elle et je ne lui ai rien dit. On devrait toujours dire aux gens que l’on est tombé amoureux d’eux, que l’on n’a pas osé leur dire, mais que l’on est content de savoir qu’ils existent même si l’on sait que l’on n’a rien à voir avec leur vie, leur travail, leur amour. Parce qu’ils meurent. Et que l’on a rien dit».

Voilà qui ferait une belle intro de long métrage. Une inconnue tenant la main d’un enfant aux Buttes-Chaumont. Un homme qui la regarde de loin. Un jour puis un autre. Avant d’apprendre un jour sa disparition.

Entre-choc des images et des lectures : c’est vers Jean Eustache, cinéaste lui aussi disparu, que BiBi se tourna instantanément. Jean Eustache dont Alain Philippon avait écrit le drame en posant cette question essentielle : «Comment rester un cinéaste de son temps, comment rester cinéaste quand ce temps commence à vous dégoûter ?» Jean Eustache qui mit magnifiquement en images l’actrice Françoise Lebrun dans La Maman et la Putain. Une Françoise Lebrun que BiBi rêve toujours de croiser aux Buttes-Chaumont ou au bord du Léman pour lui dire ce qu’il n’a jamais osé dire.

« What a Wonderful World ! »


Rumeurs sur le couple Sarkozy-Bruni
envoyé par inet. – Regardez les dernières vidéos d’actu.

BiBi ne sait pas pourquoi il fit un raccourci entre l’interview de Carla Bruni-Sarkozy sur SkyNews (Les Nouvelles du Ciel !) et l’image de Françoise Lebrun, actrice du film majeur de Jean Eustache «La Maman et la Putain». Ce film de 1972 cloua BiBi dans un fauteuil du Cinéma «L’Entrepôt» à Paris. Entre la futilité au Pouvoir («Je vis un Conte de fées » dit Carla Sarkozy) et la densité, l’intensité du magnifique monologue de Françoise Lebrun, il y a évidemment tout un gouffre, tout un Monde : Mensonge puéril d’un côté ; Colère, Passion, Tumulte et brûlure de l’autre.

De cet entrechoc, BiBi en a tiré son 600 ième article. Il a voulu rendre hommage au cinéma immémorial de Jean Eustache et voulu rappeller ici la forte conclusion d’Alain Philippon dans son livre consacré au cinéaste de Narbonne : « Comment rester un cinéaste de son temps, comment rester cinéaste quand ce temps commence à vous dégoûter ? Telle est la question qui ne cessera de hanter Jean Eustache » .


La maman et la putain eustache
envoyé par chloegc. – Regardez plus de courts métrages.
 

[A Françoise Lebrun]

« C’est une image de vous que j’ai aimée, une image porteuse de fictions innombrables. Non, ça ne m’avait jamais fait ça, une image de cinéma, une image sans emphase soutenant votre phrasé. Il y a eu là, collusion entre le Monde et vous pour m’apprendre de ce Monde, collision entre vous et moi, accident majeur jamais regretté. Je suis à vous, reconnaissant, je vous l’avoue, à vous, rien qu’à vous. Même si le temps a passé, dites-moi que ce bon temps peut revenir, dites-moi si vous avez vécu d’autres choses, si votre temps a été bien employé, dites-moi si je fais erreur sur votre personne. Dites-moi que vous avez été autrement filmée et que vous n’êtes, au jour d’aujourd’hui, ni figée, ni fixée, ni sur vos tensions d’avant-hier, ni sur vos intentions d’hier, ni sur ce film d’avant-hier. Dites-moi que vous allez toujours allègrement de l’avant, qu’il y a eu d’autres films, d’autres pièces, d’autres créneaux, d’autres châteaux que je connais pas, qu’il y a eu, pour la femme libre que vous êtes, d’autres libertés prises, d’autres prises de vues libres, dites-moi que vous êtes toujours prise, éprise de prises de vues. Alors, alors, me reviendra le temps d’une seconde jeunesse ».

Littérature amie.

Les Oeuvres complètes de William Blake

1. Dans le numéro du Matricule des Anges d’avril 2009, BiBi a lu une interview de Bernard Vallée, libraire à Rennes. Les propos sont amers : «Nos étudiants lisent moins qu’avant, en histoire comme en lettres, ou bien ils vont sur Internet. En tout cas, j’en vois beaucoup moins passer qu’il y a 10 ans. J’ai le sentiment qu’ils n’ont plus la culture du Livre. Je suis très pessimiste pour l’avenir de libraires comme moi».
Chaque fin du mois d’août, le libraire rennais organise des rencontres autour d’un thème «Les Politiques de la Peur» (avec Gilles Clément et Michel Surya en 2005) et «La Démocratie possible ou impossible» (avec Jacques Rancière en 2006). Si, par hasard,  notre libraire tombe sur le présent article, qu’il donne à BiBi et à ses amis, le programme des festivités de l’été 2009.

2. Pessimiste aussi François Gèze, PDG des Editions de la Découverte. Au dernier Salon du Livre, il s’alarmait : «Une étude sociologique ou historique se vendait en moyenne à 2200 exemplaires en 1980. Aujourd’hui, c’est entre 600 et 1000. Nos auteurs qui sont des universitaires s’interrogent sur le Savoir à transmettre et ont des doutes sur leur rôle dans la société». Pas si pessimistes que ça, les Chercheurs, puisqu’ils le crient dans la rue.

3. Restituer le Réel dans sa complexité. Par l’art, la pensée, la littérature. Bonne occasion de découvrir l’œuvre de William Blake. Ce poète et graveur anglais, longtemps méconnu par les français, est né à Londres en 1757. Il mourut en 1827. «Les perceptions de l.homme ne sont pas limitées par les organes de la perception : l.homme perçoit plus que ne peuvent découvrir les sens (si aigus soient-ils)» écrivait-il ou encore «La route de l.excès mène au palais de la sagesse». Georges Bataille en fit l’éloge dans un chapitre de son livre «La Littérature et le Mal». William Blake a illustré la Bible, la Divine Comédie, il s.est inspiré des mythes, de Shakespeare, de Milton. Il a eu des influences décisives sur Jim Morrison, Patti Smith par exemple. Pour la première fois depuis 60 ans, Paris accueille une rétrospective de son œuvre. «Mad Blake». Blake est donc au Petit Palais, jusqu.au 28 juin 2009. Voilà qui devrait rendre le sourire à notre libraire et à notre éditeur.

4. BiBi ne connaît pas encore les textes de Marie Cosnay qu’il a découvert dans son interview dans le même numéro du Matricule des Anges. Le simple fait qu’elle ait fait du théâtre avec l’actrice Françoise Lebrun (douce héroïne de La Maman et la Putain de Jean Eustache), qu’elle ait travaillé avec  elle ses alexandrins suffit à intriguer et intéresser BiBi. De plus, Marie Cosnay écrit des textes dans des revues de qualité (La Polygraphe, Petite) et fait œuvre de citoyenne en aidant les migrants via son adhésion à la Cimade. BiBi l’inscrit sans attendre sur son Carnet de bal.