Le Livre, la lecture, le métro et Michel Butor.

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Madeleine Santschi a rencontré Michel Butor dans ce livre (« Voyage avec Michel Butor » aux Editions de l’Âge d’Homme). Michel Butor : un de ces écrivains qui a toujours foncé tête baissée, sans préoccupation des Honneurs, à distance du cynisme et de ce Parisianisme honteux. BiBi a toujours aimé cette souterraine joie de vivre alliée à la non moins souterraine Inquiétude chez cet écrivain. Il n’a pas oublié cet aphorisme : « Celui qui ne rira pas sera la proie des loups« .

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«A Paris, je suis un homme du métro. J’aime le souterrain. Et j’aime beaucoup par ailleurs quand le souterrain se met à sortir de terre, quand cela devient métro aérien. Je trouve que le mot aérien a quelque chose de très poétique. J’ai donc beaucoup regardé les gens lire dans le métro, la plupart du temps le journal, mais il y en a aussi qui lisent des choses très difficiles, très sérieuses. Debout, par exemple, en se tenant au poteau, ils se concentrent d’une façon particulière. La lecture de deux ou trois paragraphes dans le métro peut être d’une extraordinaire intensité. Je serais très heureux si un jour je pouvais voir des gens lire «Envois» [un des livres de Michel Butor] dans le métro».

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«Il y a une mythologie de l’écrivain extrêmement pernicieuse. Et moins les gens ont l’habitude de la lecture, plus ils sont soumis à cette mythologie de l’écrivain comme Monstre sacré».

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«Je n’ai, voyez-vous, pas envie de lecteurs paresseux ou faciles (…). Hélas, on a envie de comprendre les choses tout de suite. Or mes livres ne sont pas faits pour les gens qui s’imaginent pouvoir tout comprendre tout de suite. Une espèce de modestie est nécessaire. Je veux dire que celui qui voudrait tout comprendre immédiatement n’y arrivera pas. Le livre, si vous voulez, se fermera devant ses yeux, devant sa prétention».

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Sur Michel Butor, lire aussi ici :

 

Les Angoisses du Tireur au moment du Penalty.

BiBi n’a jamais vraiment compris le titre du film de Wim Wenders (et l’intitulé du scénario de Peter Handke) : «L’Angoisse du Gardien de But au Moment du Penalty».

Il estime encore aujourd’hui qu’au contraire, c’est le tireur qui joue gros dans cette affaire. Si le gardien n’arrête pas le tir, il n’aura certes pas les faveurs de la foule mais ne sera pas déshonoré pour autant. Pour celui qui s’avance au point à la chaux blanche, c’est l’exact contraire. Une réussite et c’est la Gloire, c’est la Foule et son ivresse, le Triomphe et le Royaume des Dieux assuré. A l’inverse, un échec et c’est le début d’une démolition en règle. La Déchéance. L’opprobre. La Mort peut-être.

Ils étaient trois shooteurs, trois habitués de la gagne. Mais dans les buts, régnait l’incomparable Lev Yachine.

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L’incroyable Une du JDD !

L’article de mercredi du Canard EnchaînéLa valise du dimanche») nous rappelait que Laurent Valdiguié, journaleux du JDD, avait voyagé le 5 mars 2011 tout à côté de Ziad Takieddinne et de sa mallette (avec 1,5 million d’euros en petites coupures). BiBi attendait donc avec gourmandise les confidences de Laurent sur ce voyage à bord d’un jet privé affrété par Kadhafi.

La semaine précédente, le journal de Lagardère n’avait pas hésité à publier les confidences de Bourgi, un autre intermédiaire à valise. Aussi BiBi fut étonné de ne pas voir la Une sur les rapports entre Takieddinne et notre Président en première page de ce dimanche. Il n’y avait en effet pas mieux placé que Laurent Valdiguié, Grand-Journaliste-Investigateur du journal de Frère Lagardère pour enquêter.

Il se dit qu’Olivier Jay et Bruno Jeudy, les deux merveilleux journalistes du JDD, étaient prêts à publier cette exclusivité lorsqu’un… coup de téléphone de l’Elysée vint interrompre la Conférence de Rédaction… etc… etc…

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La Mascotte du Front de Gauche.

Le Bloggeur Pas Perdus a sollicité BiBi pour trouver une Mascotte personnelle en faveur du Front de Gauche. BiBi adore ces sollicitations même s’il met du temps à répondre. Le Singe est son animal favori. Cependant, celui que présente BiBi est très singulier puisqu’il se tient à distance des siens. Il reste que – même en grimaçant – ce Singe-là reste solidaire de sa Tribe Monkeys.

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BiBi passe donc la main à Cuicui, Cpolitic, Lutopick  et à tous ceux qui grimpent aux arbres au seul nom de Sarkozy.

Un Hommage et des Images.

Bernard Cerf est directeur du Festival des cinémas différents et expérimentaux de Paris. Il  est par ailleurs réalisateur et producteur (Les productions aléatoires). Il est toujours vivant mais BiBi ne le connaît pas du tout.

Katerina Golubeva était actrice. Elle avait tourné avec Léo Carax, Bruno Dumont, Claire Denis. Elle est décédée le 14 août à Paris. BiBi ne la connaissait pas non plus, ne l’avait jamais vue.

Mais c’est la lettre de Bernard Cerf au Monde, lettre parlant de Katerina Golubeva qui a touché BiBi.

«Elle [KG] habitait près de chez moi. La première fois que je la croisai, je me demandai si c’était elle. Une amie me confirma qu’elle habitait là. Puis je la revis au Parc des Buttes-Chaumont avec sa fille. Elle avait ce visage blanc d’une beauté à la fois pure et mélancolique qui s’éclaire et mélange douceur et folie potentielle.

Je la recroisai. Lui parler n’aurait rien changé, mais j’étais amoureux d’elle et je ne lui ai rien dit. On devrait toujours dire aux gens que l’on est tombé amoureux d’eux, que l’on n’a pas osé leur dire, mais que l’on est content de savoir qu’ils existent même si l’on sait que l’on n’a rien à voir avec leur vie, leur travail, leur amour. Parce qu’ils meurent. Et que l’on a rien dit».

Voilà qui ferait une belle intro de long métrage. Une inconnue tenant la main d’un enfant aux Buttes-Chaumont. Un homme qui la regarde de loin. Un jour puis un autre. Avant d’apprendre un jour sa disparition.

Entre-choc des images et des lectures : c’est vers Jean Eustache, cinéaste lui aussi disparu, que BiBi se tourna instantanément. Jean Eustache dont Alain Philippon avait écrit le drame en posant cette question essentielle : «Comment rester un cinéaste de son temps, comment rester cinéaste quand ce temps commence à vous dégoûter ?» Jean Eustache qui mit magnifiquement en images l’actrice Françoise Lebrun dans La Maman et la Putain. Une Françoise Lebrun que BiBi rêve toujours de croiser aux Buttes-Chaumont ou au bord du Léman pour lui dire ce qu’il n’a jamais osé dire.