Yearly Archives: 2010

Digne indignation.

BiBi lit ce qu’il a sous la main. Il se saisit de ce qui trace et tresse son quotidien. Trois faisceaux ce jour : 1. l’abonnement à Télérama a été abandonné mais BiBi continue d’y jeter un œil. 2. Au boulot : il y a l’avant-dernier numéro du Lien Social qui traîne sur la table. 3. Chez le buraliste, sur une pulsion d’achat, BiBi se dit «Oui, deux euros pour le numéro de mars de Décroissance, pourquoi pas ? »

Subrepticement, via ce Triangle incongru, trois «idées» improbables et vivifiantes vont s’entrechoquer. Des croisements se font sans qu’on sache vraiment pourquoi. Au fond, ces trois lectures, ces trois faisceaux vont converger, ils convergent vers le bonheur de comprendre le Monde dans sa dimension insensée, dans sa terrifiante intranquillité.

1. A Télérama, quelques mots de Denis Polydadès font bonheur et honneur au Sens :

Question : « être acteur, c’est être un autre ? » DP : « C’est se fantasmer autre. C’est pourquoi je déteste me voir à l’image, notamment à la Télévision : elle me montre l’individu que je suis, à l’âge que j’ai. Alors que sur scène, je me prête volontiers à un autre corps, une autre voix, un autre visage » ou encore « Il faut n’avoir aucun caractère pour pouvoir les jouer tous… Michel Bouquet nous disait d’être terne, qu’il fallait consentir à être quelqu’un de pas très intéressant, n’ayant un avis sur rien, pour être tout entier dans le personnage ».

2. Dans l’hebdo Lien Social, il a cet article-interview d’Anne et Marine Rambach, co-auteurs du livre « Les Nouveaux Intellectuels précaires » chez Stock. Elles parlent des difficultés pour des travailleurs sociaux d’accompagner cette précarité spécifique : «Le travailleur social comprend parfaitement pourquoi il accompagne un ouvrier de l’industrie automobile (…) Difficile en revanche de comprendre un éditeur précaire, par exemple, avec un statut à moitié illégal, payé en droits d’auteurs, bac plus 5, bien habillé, qui habite en centre-ville et qui pourtant vous explique qu’il ne peut plus nourrir ses enfants parce qu’il touche 400 euros par mois » ou encore « Une partie de ces Intellectuels précaires, à force de dégradation progressive, décroche. Elle entre alors dans une profonde détresse. Nous avons rencontré un chercheur, géographe de surcroît, demandé pour des colloques à l’étranger. Il habitait dans un tout petit appartement, dans un état de dégradation extrême avec à peine de quoi s’acheter du café. Il était au RMI, faisait des petits boulots à l’occasion, comme du nettoyage ».

3. Revue « Décroissance » (mars 2010). La réponse d’Alain Accardo, souveraine, sans complaisance, fière et pulsionnelle, à un lecteur qui lui demandait de tenir le « ton neutre et impassible qui sied à tout discours soucieux d’objectivité » :

« Eh bien cher et savant ami, au risque d’aggraver mon cas à vos yeux, je vous répondrai que ce qui me paraît manquer le plus aujourd’hui, en matière de discours social, c’est justement l’indignation ».

Trois liens hasardeux mais au final, une seule Idée-maitresse : l’indignation, la digne Indignation.

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BiBi a continué de lire. Il invite à aller voir l’article de Thierry Crouzet (« Le Blog : forme majeure« ), l’article féroce et juste sur Apathie de NouvelHermès et les rapports de force et de farce dans le couple Chouchou et Chochotte chez… Plume de Presse.

Le Murmure des Expulsés.

L’histoire était jusqu’à aujourd’hui inconnue de BiBi. Elle lui est venue de ce petit village de Billère (64140) dans la banlieue de Pau. Son Maire socialiste, Jean-Yves Lalanne, avait donné son aval pour la réalisation d’une fresque murale sur un pan de mur d’une salle des fêtes communale. La fresque était une œuvre citoyenne dédiée aux sans-papiers et à leurs enfants expulsés.

L’inauguration a eu lieu le 5 septembre 2009. Ce jour-là, Isabelle Larrouy, porte parole de Réseau Education Sans Frontière (RESF 64), la députée-maire socialiste de Pau (Martine Lignières-Cassou), et le maire de Billère, Jean-Yves Lalanne y ont présenté le contexte et les raisons de cette commande.

Le préfet UMP très zélé des Pyrénées-Atlantiques, Philippe Rey, est venu s’y opposer prétextant que le premier magistrat de Billères serait sorti de son devoir de neutralité vis-à-vis de la Politique gouvernementale. Il a donc saisi le tribunal administratif de Pau qui – hélas – lui a donné raison. A l’audience du 4 janvier dernier, le rapporteur public s’est en effet prononcé en faveur de l’effacement du Mur et a donc décidé « l’annulation » de la décision du maire.    

Plus de mur certes… mais restent ces murmures d’expulsés et leurs soutiens.

Murmures qui reconstruiront le Mur.

Hervé Gaymard et sa Littérature à deux balles.

Souvenons-nous : depuis son appartement parisien de 600 m2 au loyer (1440 euros mensuels seulement) payé par les contribuables, Hervé Gaymard nous donnait des conseils pour qu’on se serre la ceinture ( BiBi ne compte pas les 150000 euros de travaux entrepris). En 2009, Chouchou a invité ce Chiraquien dans ses appartements à de nombreuses reprises. Pour récompenser ce nouveau larbin, Chouchou lui a offert la direction de l’Office National des Forêts.

Mais BiBi se demande de quoi ils ont pu parler. De Littérature, peut-être ?

On pourrait croire qu’Hervé a aidé notre Président à devenir Lecteur puisque ce dernier – depuis son arrivée au Pouvoir – essaye (en vain) d’ouvrir un livre et essaye (en vain) de le finir (N’est-ce pas, Carla ?). On pourrait le penser aussi puisque Le Monde (du samedi 6 mars) offre une page entière à Hervé Gaymard avec ce titre : «Contraint de démissionner de son poste de Ministre de l’Economie en 2005 (…), Hervé Gaymard se dit sauvé par son amour des livres » et clame que « la littérature est un extraordinaire viatique ».

La Littérature comme consolation à ses souffrances passées, comme nourriture sacrée qui comble sa faim et sa misère d’antan ! Quel bel article ! Merci Le Monde.

Toute cette interview complaisante ne sera que prétexte pour qu’Hervé puisse justifier ses inqualifiables errements passés. Avec cette contre-vérité manifeste : « J’ai découvert quelques heures avant tous les Français, le prix de la location (…). J’ai immédiatement demandé ma démission ». Or, rétablissons les faits : ce Monsieur n’a JAMAIS demandé sa démission : il y a été contraint. En effet, l’affaire de l’Appartement, révélée par le Canard Enchaîné, avait pris une telle ampleur qu’elle faisait tâche dans le gouvernement Chirac (Hervé est toujours un très grand ami de la famille Chirac).

Tout le Monde s’en souvient sauf… le Monde (Josyane Savigneau qui l’interroge n’intervient absolument pas pour le contredire là-dessus). Plus même, pendant dix jours, ce cher Hervé avait tenté de justifier piteusement son loyer et son séjour permanent dans cet appartement… Dix jours qu’il a évidemment oubliés et au cours desquels il avait défendu l’indéfendable. Monsieur avait même affirmé  avoir ignoré le prix d’un appartement de 600 m2 proche des Champs-Elysées. Ce cher Hervé – rappelons-le – avait en charge alors la gestion des finances publiques françaises comme Ministre de l’Economie !

Monsieur le Député UMP nous parle un peu « Littérature ». Il analyse Malraux : « Malraux, c’était la littérature liée à l’action ». Bravo. Dix lignes auparavant, Hervé s’était auto-analysé : « Pour moi, la littérature est une passion et une vie secrète et la politique répond à ma soif d’agir ». Conclusion d’évidence : notre Hervé est une réincarnation vivante d’André Malraux. Pas gêné pour deux sous, notre Hervé, non ?

Aucun doute pour BiBi : cette pleine page du Monde lui a finalement été offerte pour remettre en selle un «Intellectuel » de Droite bon chic bon genre, de ceux qui manquent à la Bande à Nicolas et à la panoplie UMP.

Hervé n’hésite guère à faire dans la vaillance, dans l’affrontement à la souffrance ( il avoue du bout des lèvres qu’il n’a pas fait de « faute personnelle » mais que dans cette affaire, il y a eu « un défaut de vigilance »), il nous joue la sérénade pitoyable de la « traversée du Désert » (comme un authentique héros de tragédie grecque), il veut nous convaincre qu’il est prêt (non à écrire un livre… encore que…) à revenir en scène (« J’ai payé à tous les sens du terme » dit-il dans un mauvais français). Il cite De Gaulle et Sœur Emmanuelle, il flirte avec un professeur du Collège de France, il adore l’Afrique (pas celle de Bolloré) mais il ne dit pas mot – ouf! – de sa femme Clara, Capitaine libérale d’Industrie, directrice de cabinet de Juppé, Présidente de General Electric qui, elle, n’aime pas du tout, du tout, du tout, évoquer « l’Affaire Gaymard ».

Pas de chance pour Hervé et Clara Gaymard : BiBi, au contraire, aime beaucoup « l’Affaire Gaymard ». Et il n’est pas loin de déclarer que, hors ce Scandale éhonté, tout le reste n’est que littérature.

Tout le Monde sur le pont ! Le Bateau UMP tangue.

Olivier Jay (du JDD) et le Taxidermiste.

 

JOURNALEUX : BiBi a une prédilection pour les Journaleux du Journal Du Dimanche. Il les suit à la trace et il aime beaucoup disséquer leur plan de carrière. C’est que, cul assis entre deux chaises, ces Journaleux vont et viennent entre chaises vides et chaises tournantes. Ainsi, pendant deux années, Olivier Jay resta dans l’ombre de Christian de Villeneuve aujourd’hui remercié par de bien belles louanges assassines (Dans les Sphères des Puissants, le panégyrique est bien souvent synonyme de couronne mortuaire). Aujourd’hui, voilà notre Jay au sommet de l’Olivier.

JOLIE PLUME COLORÉE : BiBi, relisant un des derniers articles de ce nouveau Dirlo, avait relevé : « Les vraies cibles de notre Président [Sarkozy], ce sont les patrons, les banquiers et certains dirigeants ». Ou encore, (il y a tout juste un an) : «Les États fournissant aux banques les liquidités nécessaires pour financer les entreprises, une certaine reprise de l’économie devrait intervenir assez rapidement». Jolie plume de Jay, non ?

FABLE FABULEUSE : BiBi, impressionné par ses fables colorées, en avait même plagié une : «Maitre Jay, perché sur son olivier, tenait dans son bec, un mirage/ Mais Maître BiBi, par l’odeur alléché/ lui tint à peu près ce langage /Et bonjour, Monsieur Jay du JDD/Que vous êtes joli /Que vous me semblez beau !»

ENVOL POUR 2012 : Seul aux commandes, fier oiseau sur sa branche, Jay est donc devenu Directeur de la Rédaction du JDD par la bonne grâce de Didier Quillot, président très sarkozyste du Directoire Lagardère Active. Un proche, aux pieds de l’Olivier, résume : «Très travailleur, Jay est l’homme aux mille et un réseaux. A la fois habile et subtil, il réalise un rêve qu’il visait depuis près de deux ans ».

OISEAU ZELE : Après être sorti du nid IEP, Jay a pépié dix ans durant dans Les Échos, journal dont le proprio est aujourd’hui Bernard Arnault. Il dirigera ensuite les Rédactions numériques de Bayard (2000-2005) puis survolera les toits de l’Usine Nouvelle (2006). Au JDD, il saluera bien bas Michel Pébereau (qui tient régulièrement chronique de Science-fiction dans le JDD), déploiera ses ailes dans l’animation ininterrompue des Ateliers MEDEF. Là, gazouillant, il tutoie le Ciel du Libéralisme et les Rapaces du CAC 40, montant souvent Lagarde autour de Christine. Pas de doute, c’est bien là que «l’Homme aux mille et un réseaux » a pris son envol et continuera d’y tremper sa plume.

GAZOUILLIS INTERDIT : Cher Olivier, ne faites pas l’erreur de demander un gazouillis au compte Twitter de BiBi comme le fit votre Monsieur Claude (Askolovitch). Le Jay doit se méfier car chaque dimanche, BiBi dépouille votre journal, BiBi dissèque vos articles, BiBi tanne vos Journaleux et BiBi démoule vos mensonges. C’est que… BiBi – renseignez-vous – est sûrement un valeureux taxidermiste.