Yearly Archives: 2010

La dernière photographie de Julia.

–  C’est la dernière photo de Julia, lâcha le détective, un brin gêné.

Julia était de dos, elle avançait dans la rue pavée en tirant une valise derrière elle. Un noir et blanc de belle facture. J’examinai longuement le cliché.

– Vous savez, continua t-il, je vais abandonner ce foutu métier. Je me reconvertis dans la photographie.

Je relevai la tête, l’air interrogatif.

–  Oui, insista t-il, la photo a toujours été ma passion. Euh… à propos de cet instant… (de son index, il tapota le cliché), je voulais vous dire. Votre dame était pressée, elle courait presque. J’ai eu du mal à la suivre. Elle…

– Vous m’avez déjà tout raconté. L’avion, l’aéroport, ce fantôme de Massimo…

– Ils sont partis ce maudit mardi. Tous les deux.

– Dites-moi, fis-je agacé, pour quelle raison aviez-vous gardé cette photo ?

– Je voulais l’agrandir et la mettre dans mon exposition. J’ai eu un contrat d’importance à la Galerie. Une exposition avec 60 de mes photos. Julia est la plus belle. Enfin, je veux dire, le cliché de votre dame.

Il sortit une carte et me la tendit. Je lus en silence : «Robert Lubanski. 60 Photos de détective. Galerie du Net ».

– Vous ne m’en voulez pas ?

Je grommelai en faisant un vague non de la tête. Le détective continuait d’être mal à l’aise :

– Il y aussi autre chose…

Un long silence s’installa pendant que je terminai ma bière. Je me rappelai que tout s’était achevé un mardi. Je comptais les jours, bientôt 90 et les nuits. 90, 90, 90 nuits. Mon portable avait sonné en pleine conférence. Un flic de l’aéroport. Un délégué à Roissy qui m’avertissait du crash. 281 morts. Aucun survivant. Je n’avais pas bien compris. Ecoutez, ça peut attendre, non ? J’avais repris mon cours sur Flaubert. L’éducation sentimentale. J’avais mis en débat la page 4. Frédéric Moreau rencontre Madame Arnoux pour la première fois et s’écrie : « Ce fut comme une apparition ». Le désastre allait venir plus tard.

– Cette photo…

La voix hésitante du détective me sortit de ma torpeur :

– Eh bien oui, Robert, allez-y. Quoi, cette photo ? 

– Mon expo s’est ouverte la semaine dernière et vous savez comment sont les gens, ils sont sans scrupules. Il y a un visiteur qui a photographié ce cliché de Julia en catimini…

– Et ?

– Il l’a mis en ligne sur Internet, sur son blog pour en faire un jeu.

– Un jeu ?

– Un jeu d’écritures (Il sortit un bout de papier qu’il déplia). Je vous ai écrit l’adresse du site. Vous pourrez aller y faire un tour.

Je demandai en fronçant le sourcil :

– De quoi s’agit-il ?

– Je suis étonné. Ce jeu d’écritures n’est pas un tag, pas un concours, pas même une compétition littéraire. Il n’y a aucun prix. La règle veut que chacun peut envoyer un texte sur le site à partir d’une photographie. Ce mois-ci, ils ont mis en ligne le cliché de Julia. C’est un énorme succès. Je… je n’ai rien pu faire. Je n’y suis pour rien.

– Ne vous en faites pas, Robert.

Il parut soulagé. Maintenant qu’il avait tout lâché, il n’avait qu’une seule envie : partir pour oublier cette dernière histoire. Rayer de la carte ce putain de boulot, ne plus rien avoir avec ces connards de clients. Fuir à tout jamais ces maris trompés qui le payaient pour suivre leur femme et qui apprenaient l’irréparable.

Robert Lubanski se leva pendant que je déchiffrai la note qu’il m’avait donnée. « blog à millemains : http://a1000mains.hautetfort.com »

– Vous viendrez à mon expo ? lâcha t-il timidement.

Je hochai de la tête mais mon esprit était ailleurs. Je participerai. J’écrirai. Je leur dirai ta valise bourrée de tout mon amour, je leur dirai ces hauts-talons achetés pour notre anniversaire de mariage, je leur raconterai ta précipitation sur le pavé de cette rue, ton trait de caractère, toujours, toujours pressée. Tu cours vers moi, tu poses ta valise, tu ouvres grand les bras, tu es déjà sur moi, Julia, sur moi, à m’embrasser, à m’enlacer, à m’entraîner. Tiens, regarde ! Personne n’a remarqué que tu téléphonais. Ta main gauche à ton oreille. Tu téléphonais. Tu me téléphonais. Je l’écrirai, je leur crierai tout, je leur dirai notre fidélité, notre amour indestructible. Je l’écrierai, je l’écrierai. Je l’écrierai. Je l’écrierai.

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JDD : la « Une » à laquelle vous avez échappé…

Le JDD n’a pas osé mettre en « Une » la photo et le titre-montage de BiBi. Dommage: le Journal du Frère Lagardère aurait certainement gagné beaucoup de lecteurs. Fort heureusement, avec la bénédiction d’Olivier Jay, Claude Askolovitch nous emmène faire un voyage dans la Chanson et le Prolétariat.

Claude Askolovitch, désormais numéro Deux du JDD, n’a, lui, aucun complexe. Il larmoie sur Jean Ferrat en page 2, il célèbre la Classe ouvrière à coups de clichés (pudique, il n’ose quand même pas écrire qu’elle a disparu), il laisse entendre qu’il s’encanaillerait bien avec une môme qui cultiverait «l’érotisme prolétarien» avant – sitôt passé les premières pages d’un lyrisme de pacotille – de nous consoler avec les Elixirs du Docteur Strauss-Kahn.

Après ses mésaventures avec BiBi, on sait désormais avec quels médocs le brave Toutou Lagardère s’est soigné. Il toussote encore 60 lignes pour nous vanter les diagnostics de crise et les soins appropriés, façon FMI. Bien sur, il nous cache toutes les manifestations de colère et de protestation qui se multiplient de par le Monde contre cette Organisation au service des Puissants : qu’est-ce qu’il ne ferait pas pour éviter la rechute !

Ainsi, il paraitrait que le bon Docteur Strauss-Kahn a trouvé un élixir de jouvence qui l’a transformé en « ami des faibles », en un « acteur de progrès ». Avec ses fioles, DSK se montre désormais « compréhensif » auprès « des sociétés civiles » et il tient en son FMI «la preuve» par laquelle il prétend « démontrer la validité du paradigme social-démocrate ». «La Métamorphose est en bonne voie » lâche notre Journaleux.

La Métamorphose ? Quelle métamorphose ? Le 21 octobre 2008, notre Clo-Clo du JDD versait de la même façon dans l’idolâtrie quasi-stalinienne : «En France, l’opinion a retrouvé le DSK magnifique, le seul économiste capable de rassurer au cœur de la tempête…»  «Un économiste doué pour le bonheur» ou encore «un magicien de la communication économique», «un socialiste moderne» très jalousé, « le trop heureux Dominique fait figure de pôle de stabilité » «le seul politique qui gèrerait mieux la crise mondiale que Chouchou».

Entre le Chanteur et les Maitres-Chanteurs, BiBi n’a d’oreille exclusive et bienveillante que pour le premier.

Toutes les voix comptent (surtout celle de Jean Ferrat).

Jean Ferrat.

Un jour, grimpant les lacets menant à Antraigues, BiBi aperçut Jean Ferrat sur la place qui jouait à la pétanque. Nous étions sous la France de Giscard. Entre les arbres, sur les murs des maisons de pierre, on voyait d’immenses calicots, des banderoles déployées, des drapeaux chiliens : on y lisait le soutien et la solidarité avec les Peuples d’Amérique latine qui luttaient contre l’Impérialisme US.

A France-Info, on lit le communiqué-hommage de Sarkozy à Jean Ferrat.  Obscène. On oublie de dire que le chanteur avait déclaré :  « Nicolas Sarkozy est un arriviste forcené qui, soi-disant, pense à la France… Ses idées sont détestables ».

BiBi se souvient que dans «Fragments du Discours amoureux», Roland Barthes écrivait : «Nous Deux – le magazine – est plus obscène que Sade ». BiBi a eu cette même impression après avoir écouté Carla Bruni-Sarkozy parler sur Sky News de son grand amour, de la « solidité » de son couple etc… Obscénité-bis : à mille lieues de l’Amour/Aragon chanté par Ferrat.

Konrad Hummler.

Jean Ferrat avait en horreur les Konrad Hummler du Monde entier. Konrad Hummler est le président de l’Association des banques privées suisses. Il a déclaré dans la Tribune de Genève : «Renoncer au secret bancaire ferait du mal au pays tout entier». Toujours cette arrogance chez ces banquiers : Konrad et ses amis s’arrogent le droit de parler au nom d’un pays tout entier.

Décroissance et Bakchich.

Dans le numéro de Décroissance, l’équipe éditoriale (Paul Ariès and Co) se paye Dany-le-Rouge en rappelant ses hauts faits d’armes. Elle dénonce à juste titre l’abandon du politique dans ce Mouvement entré dans l’arène dans les années 70 au profit du Spectaculaire. Outre la chronique féroce d’Alain Accardo, BiBi s’est attardé sur l’article de Guillaume Carnino qui nous conte son itinéraire de lecteur trentenaire, lecteur qui se demande si ce n’est pas « Internet et sa culture de l’immédiateté qui donnent de moins en moins envie de lire ». Il rajoute ce possible constat qu’à «moyen terme, il devienne insupportable, y compris physiquement, de lire des livres pour tout un pan de la population». Pas faux.

Heureusement, le papier existe : Bakchich-hebdo, lui, revient à un euro avec une qualité papier supérieure et une mise en page plus agréable, plus riche et plus fouillée.

www. megacouscous.net

Après avoir lu les articles-BiBi sur les méandres de la Politique humanitaire de Chouchou et du Mentor de Carla (Grégoire Verdeaux), les organisations de lutte contre le Sida ont posté dans sa Boite-mail une invitation au Méga-Couscous du 20 mars à la Maison de la Jeunesse de Saint-Denis. BiBi y sera en… pensées mais avis aux Parisiens et aux banlieusards : dépêchez-vous de réserver les dernières places à http://www.papamamanbebe.net/couscous

Et n’oubliez pas de saluer Tina de la part de BiBi.

« What a Wonderful World ! »


Rumeurs sur le couple Sarkozy-Bruni
envoyé par inet. – Regardez les dernières vidéos d’actu.

BiBi ne sait pas pourquoi il fit un raccourci entre l’interview de Carla Bruni-Sarkozy sur SkyNews (Les Nouvelles du Ciel !) et l’image de Françoise Lebrun, actrice du film majeur de Jean Eustache «La Maman et la Putain». Ce film de 1972 cloua BiBi dans un fauteuil du Cinéma «L’Entrepôt» à Paris. Entre la futilité au Pouvoir («Je vis un Conte de fées » dit Carla Sarkozy) et la densité, l’intensité du magnifique monologue de Françoise Lebrun, il y a évidemment tout un gouffre, tout un Monde : Mensonge puéril d’un côté ; Colère, Passion, Tumulte et brûlure de l’autre.

De cet entrechoc, BiBi en a tiré son 600 ième article. Il a voulu rendre hommage au cinéma immémorial de Jean Eustache et voulu rappeller ici la forte conclusion d’Alain Philippon dans son livre consacré au cinéaste de Narbonne : « Comment rester un cinéaste de son temps, comment rester cinéaste quand ce temps commence à vous dégoûter ? Telle est la question qui ne cessera de hanter Jean Eustache » .


La maman et la putain eustache
envoyé par chloegc. – Regardez plus de courts métrages.
 

[A Françoise Lebrun]

« C’est une image de vous que j’ai aimée, une image porteuse de fictions innombrables. Non, ça ne m’avait jamais fait ça, une image de cinéma, une image sans emphase soutenant votre phrasé. Il y a eu là, collusion entre le Monde et vous pour m’apprendre de ce Monde, collision entre vous et moi, accident majeur jamais regretté. Je suis à vous, reconnaissant, je vous l’avoue, à vous, rien qu’à vous. Même si le temps a passé, dites-moi que ce bon temps peut revenir, dites-moi si vous avez vécu d’autres choses, si votre temps a été bien employé, dites-moi si je fais erreur sur votre personne. Dites-moi que vous avez été autrement filmée et que vous n’êtes, au jour d’aujourd’hui, ni figée, ni fixée, ni sur vos tensions d’avant-hier, ni sur vos intentions d’hier, ni sur ce film d’avant-hier. Dites-moi que vous allez toujours allègrement de l’avant, qu’il y a eu d’autres films, d’autres pièces, d’autres créneaux, d’autres châteaux que je connais pas, qu’il y a eu, pour la femme libre que vous êtes, d’autres libertés prises, d’autres prises de vues libres, dites-moi que vous êtes toujours prise, éprise de prises de vues. Alors, alors, me reviendra le temps d’une seconde jeunesse ».

Les Flèches de BiBi (8/15 mars).

Rumeur de Salon.

La rumeur aurait débuté puis enflé au Salon (de l’Agri-cul-ture) mais la Presse française, digne et exemplaire, se tait. Cela n’empêche guère Paris-Match d’exhiber Cécilia à New-York, Carla de s’étaler sur son bonheur d’héroïne de « Conte de Fée » et Luc Châtel, gros client d’Intermarché, de brandir le respect de la vie privée.

La Tribune de Genève conclut plus simplement : « Comment un Chef d’Etat peut-il brandir le respect de la vie privée alors qu’il l’étale à longueur de couverture de magazines » ? Allez, que les paysans retournent aux Champs, que Carla retourne au Chant et vous, Français, ne vous inquiétez pas : le Pays, ses Vaches et ses Veaux, seront bien gardés.

Le Modèle français.

Barbara Rosenkranz fait parler d’elle. Le 25 avril prochain, elle aura le champ libre pour affronter le Chef de l’Etat autrichien, Heinz Fischer, social-démocrate. Candidate de l’extrême-Droite (FPO), Madame est très proche des milieux néo-nazis.

Ce sont évidemment les négligences quotidiennes dans l’approche du rapport au nazisme, l’acceptation en continu d’un style populiste avec antisémitisme et xénophobie qui ont fait que Madame envisage de tutoyer les 20% d’opinions favorables. Les Français n’ont évidemment guère de leçons à donner car, bien avant d’entendre Brice et Gérard parler des Auvergnats et du « Corps français traditionnel », notre belle France 2002 avait offert au Monde ahuri un surprenant second tour.

Pierre Bergé.

Il fait de la pub pour le vin mais ne déplore même pas que notre Président fasse preuve d’abstinence. « Je trouve ça très bien. On n’a pas envie d’un Président de la République qui ressemblerait à un pochard ». Sarkozy a désormais deux supporters : un Pernaut et un Bergé tout blanc. Pas besoin d’attendre le troisième verre pour crier : « Attention les dégâts ».

 Alain Joyandet.

Lors de sa campagne électorale en Franche-Comté, Alain Joyandet se vante d’avoir « serré plus de 15000 mains ». Il ne dit pas combien d’électeurs – en retour –  lui placeraient bien un coup de pied là où vous savez. De l’avis de BiBi, un seul – bien balancé – suffirait.

Jean-Pierre Coffe trinque avec les Lobbyistes.

Missionnés par Valérie Pécresse pour enquêter sur la restauration en Restau-U, Jean-Pierre Coffe, gros mangeur à tous les râteliers, et Jean-Robert Pitte trouvent « dommage que l’offre de boissons alcoolisées ait presque disparu des Restos-U ». Bon, c’est vrai, c’est discutable et ça peut se discuter autour d’un verre. Là où il y a un… hic, c’est lorsqu’on apprend que notre Coffe est chaperonné par l’Association Vin et Société, puissant lobby viticole sur lequel il ne tarit pas d’éloges. Du coup, une paille et un seau d’eau, voilà tout ce que mérite notre fine et grande gueule.

Bruno Solo.

BiBi l’aime bien. Ce sera sa flèche de cœur hebdomadaire. Dans le Monde du jour, Bruno Solo lâche : « Le fils de prolo que j’étais a côtoyé au lycée des fils d’avocats, de grands patrons. Je ne me sentais pas en marge par rapport à ces gosses de riches. Je n’ai pas eu de complexe social ». T’es pas Solo, cher Bruno : voilà une flèche-bibi bien envoyée.