Category Archives: Les Fictions BiBi

Une écriture débraillée.

En nous, le feu qui couve, en nous les tisons sous nos apparences cendrées.

En nous, les grands incendies qui détruisent nos certitudes et dévastent nos territoires.

En nous, les feux où l’on se réchauffe le cœur, les pensées, où l’on se brûle les doigts.

En nous, les petites flammes qui éclairent nos coins fragiles et les abords de nos tentes de nomades.

Témoigner par brûlures, par pensées incendiaires. Toutes têtes brûlées que nous sommes

que nous serons

que nous resterons.

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Notre Vie condensée en un livre, en un chapitre. Mieux même : en une phrase, en une ligne, en un mot, en un instantané. Mieux encore : en un soupir, en un silence.

Et sans se préoccuper du reste, aller au bout de ce que nous aimons.

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Je ne suis pas tombé au bon siècle, pas tombé aussi au bon endroit. Je suis l’étranger. C’est sous l’ombre des grands châtaigniers que je suis resté une bonne partie de cet après-midi. Chaud soleil d’été. Une heure plus tard, une voix m’a rappelé à l’ordre : « Non, tu n’es pas l’étranger. Tu as été au bon endroit, à la bonne heure ».

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Ces premières heures matinales : valse hésitation, oscillation ténue entre deux souffrances. Celles inutiles, celles créatrices.

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Sur leur Amour abstrait de l’Homme, ils pérorent des heures et des heures. Présentez-leur un être singulier : ils ne l’écoutent plus au bout de dix secondes.

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Que dire des écrivaillons ? Cet aphorisme : « En cas de malheur, alpaguez le premier écrivain qui passe et demandez-lui de l’aide : il ne bougera pas, le couard, mais il vous tendra la main pour vous offrir son dernier livre. »

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Écrire : c’est-à-dire ne pas commencer à blablater sur tout, à parler de tout, à se prononcer sur tout. Que celui qui écrit vienne plutôt s’expliquer sur son aventure personnelle, sur son trajet singulier dans l’écriture. Rien de plus déshonorant que les écrivains-sandwichs parlant de grande Cuisine et pérorant sur la Faim dans le Monde. Qu’ils nous disent plutôt, ces Pauvres cornichons où ils ont trouvé leurs Jambon-beurre : ça calmera peut-être notre faim.

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Tant de choses, tant de Mondes nous échappent. « Tant de vers disparus. Je n’en note aucun. » disait la poétesse russe Marina Tsvetaeva. J’ai, moi aussi, la mémoire qui se trouble, qui me trouble.

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La Vie ne se laisse pas enfermer : ni dans nos désirs conscients, ni dans nos projets élaborés, ni dans nos écrits, ni dans le laisser-faire, ni dans le laisser-aller.

La Vie ne se laisse jamais enfermer. Un point c’est tout.

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Que Dieu, au milieu de tout ce Cirque, nous préserve du mensonge, de la jalousie, des pensées malveillantes, de sarcasmes secrets, des rires de mépris et de haine. Soit. Mais qu’Il nous préserve tout autant de ces masques d’amabilité, des sourires conviviaux, de ces révérences assassines et de cette hypocrite bonne humeur publique et privée qui est le fléau des Temps Présents.

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Écrire débraillé : voilà ma devise d’Homme qui écrit.

«Je suis vieux, pas nostalgique et je vous emmerde» (1)

BiBi se demande s’il n’est pas touché par le phénomène de la ventriloquie. Cette nuit, il a écouté une voix – celle de son Double – qui lui chantonnait ce curieux refrain : «Je suis vieux, pas nostalgique du tout et je vous emmerde».

Infantilisation et Désir de régresser.

D’un côté l’infantilisation prônée à vitesse grand V par le Marketing et les Publicitaires, de l’autre, le désir increvable chez l’adulte (30-60 ans) de régresser. L’un ne va pas sans l’autre. Les deux axes sont solidaires et traversent le Corps social dans son entier – particulièrement dans ses couches moyennes.

Mon Ami Quinqua.

Lorsqu’il m’a demandé si j’étais inscrit à CopainDavant.com (12 millions d’inscrits en France) ou si j’étais allé sur Photo-de-classe.com (130.000 clichés en ligne), il a souri à ma réponse négative.

Mais je n’ai pas aimé ce rictus narquois. Du tout. Et, furieux, je lui ai crié sans raison : « Je suis vieux, pas nostalgique et je t’emmerde ». Sans raison ? voire.

Lui, il avait retrouvé ses potes de Troisième du lycée en 1970 et a cherché à savoir personnellement ce qu’ils étaient devenus. Après le premier contact, ils n’avaient plus rien à se dire. Il m’a ensuite rajouté [en sourdine] : «J’ai même retrouvé celle qui m’a dépucelé».

Machine arrière toute.

Ces retrouvailles en ligne témoignent des pulsions régressives qui, si vous refusez de les satisfaire, vous fait passer pour un ringard. C’est ce qu’explique le psychologue clinicien Michaël Stora : «Avec les réseaux sociaux, chacun peut renouer avec son passé, retrouver une période de sa vie d’il y a plusieurs années, au moment où celui-ci réalise qu’il devient adulte. C’est le désir de régresser».

Il ne s’agit pas d’un besoin de se réapproprier son propre passé, d’en faire un bilan pour aller de l’avant mais d’échapper au présent en se polarisant à l’extrême sur le Passé, sur son passé.

Peur du Conflit.

Nous sommes dans une période d’évitement des conflits. Même les syndicats parlent de «partenaires sociaux» en rencontrant les Représentants Patronaux, jamais d’«adversaires sociaux». A l’échelle individuelle, les Vieux jouent aux Jeunes. Du conflit de générations, on n’en veut plus. Du coup, on fabrique une masse indifférenciée de mutants ( les «Kidults», contraction de «Kids» et d’ «Adults»).

On écoute la zizique de son fils, on se colle du tee-shirt «Che» sur son ventre bedonnant, on joue à la Lolita malgré ses culottes de cheval, on sort sa Play, on se rue au Cinoche pour voir Harry Potter ou Shrek 4.

Adultes atteints de crétinitude.

Ils refusent le MOURIR, l’angoisse qui nourrit l’Humain et l’Incertitude qui fait vivre. Ils se bardent de marques – les mêmes que les gars de 20 piges-, ils se gavent de jeux-vidéos ( aux USA, 75% sont des adultes et leur âge moyen 32 ans). Passé la cinquantaine, ils sont encore plus aveugles. Ils ne sont pas vieux, ils sont «Seniors». Ils sont dans le déni, regardant sans ciller le mot d’ordre obscène de la Pub Virgin («Ne vieillissez pas trop vite»). Derrière ces modèles, ils ne devinent pas l’Obscénité et la Violence symbolique. Pour un peu, ils ne sont pas loin de croire dur comme fer au Grand Fantasme du Libéralisme : «Achetez ! Suivez les Conseils du Marché et vous deviendrez immortels».

Eh bien, moi, Refrain : «Je suis vieux, pas nostalgique et je vous emmerde».

Refus de la Séparation.

On ringardise ceux qui décrient l’effacement des frontières entre générations. On se moque de ceux qui veulent assumer leur présence changeante et douloureuse au Monde. Merde à ceux qui ne veulent pas reconnaître le Temps qui passe. Merde à ceux qui écartent sans cesse les difficultés toute humaines à éprouver ces passages vitaux, inéluctables.

A suivre… (Part 2 : Le temps de reprendre mon second souffle).

De l’Autre Côté…

Le Blog à Mille Mains et le Blog de Louise Imagine proposent aux bloggeurs de participer à leur sixième édition du Jeu d’écriture. Le principe reste le même : à partir de la photo ci-dessous, toutes et tous les volontaires écrivent un texte. Il n’y aucune contrainte de forme ou de style, seulement celle de s’inspirer de cette photo et de rester sur une longueur raisonnable pour un texte de blog.

BiBi a décidé de participer en mettant à nouveau la main au clavier.

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« De l’Autre Côté...»

Dans le courrier que Madame Carole Lewis m’avait adressé, les indications étaient précises. Comme demandé, j’avais acheté un billet-aller pour Berlin puis j’avais sauté dans le premier avion, direction Tallinn. Parti de l’aéroport de la Capitale estonienne, le taxi commandé me déposa à la Gare Centrale. Le plan de la Station se révéla exact : le box du Photomaton se situait bien à l’entrée du hall. «Bychlé Foto» : je n’eus aucun mal à le trouver.

Je relisais les recommandations sur le feuillet de Madame Lewis : «Surtout, suivez les consignes à la lettre». Je m’étais donc exécuté : entrer dans le box, s’asseoir sur le siège pivotant, régler sa hauteur, tirer le rideau, glisser trois fois un euro dans la fente puis attendre. Comme prévu, le premier flash vint rapidement suivi tout aussitôt du second. Le troisième éclair fut plus intense encore mais c’est après le quatrième que tout bascula.

Sous mes pieds, je sentis le sol se dérober. La moitié du box se mit aussitôt à pivoter. Mon regard se chargea d’une brusque inquiétude devant ce demi-tour inattendu. Mais le mouvement de rotation ne dura pas : tout s’immobilisa dans les secondes qui suivirent.

Je compris alors que j’étais passé de l’autre côté.

– Soyez le bienvenu au Pays des Merveilles ! (L’étrange fillette qui me faisait face avait une voix claire). Bonjour, je m’appelle Alice, rajouta t-elle.

Je me rencognai dans mon siège, mal à l’aise.

– Je… je m’attendais plutôt à trouver Madame Carole Lewis, me hasardai-je.

L’enfant étouffa un rire :

– Oui, l’erreur est fréquente. Ce n’est pas Madame Lewis qui vous a invité.

– Ce n’est pas Madame mais… qui alors ?

La jeune inconnue fit un geste d’invite :

– Suivez-moi. C’est Monsieur qui vous attend. (Devant ma surprise, elle hocha la tête avec insistance). Oui, venez ! C’est Monsieur qui vous attend. Monsieur Lewis Caroll.

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Pour lire les participations antérieures de BiBi :

Nicolas Sarkozy renonce à un second mandat !

Nicolas Sarkozy va renoncer à un second mandat !

Ce courrier tombé dans la Boite aux lettres de BiBi nous le confirme. C’est cependant une nouvelle à prendre et à lire avec précaution.

Depuis plusieurs mois cependant, la côte de notre Président est restée implacablement à un niveau jamais atteint. Jean-Louis Borloo va se présenter sans complexe, Dominique de Villepin est prêt, François Fillon a pris ses distances et sauf miracle, ça continuera d’être la débandade à l’UMP.

On ne sait comment cette troisième lettre (1) a atterri une nouvelle fois chez BiBi. La grande amie de Madame Carla est la première personne digne de confiance de notre première Dame. Voilà donc in-extenso et sans aucune biffure, le texte de l’amie romaine.

16 Piques & Répliques-BiBi.

1. « Magie des Idées : soulevez votre chapeau, il se peut que vous trouviez une idée ;  soulevez un lièvre, il se peut que vous travailliez du chapeau».

2. « Si vous avez de drôles d’idées, sachez qu’elles ne vous feront pas forcément rire».