LE BLUES DU BLOGUEUR.

bibi-blog

Entretien. (BiBi avec son ami).

J’aurais voulu parler tranquilou de la pluie et du beau temps, de choses légères (et de bien d’autres) avec mon ami. Seulement, il y a des urgences, il y a des nécessités.

Il y a, par exemple, ces crapules médiatiques qui semblent se multiplier, rôdant dans les rédactions, chiens de garde aux sièges réservés (de la télé jusqu’à France-Culture). Il y a tous ces charognards, think-tankers, lèche-bottes des banques, briseurs de grève, idéologues de la Pensée Unique qui prennent pied dans mon quotidien, avec cette haine aux lèvres, haine avouée – sans complexe – de l’Etranger.

Toute cette minorité au pouvoir (ou dans ses couloirs) ne veut qu’une seule chose : nous étouffer.

Et il y a, dans le fond du jardin, toutes ces pages de blog que je m’efforce de faire pousser.

*

  • Toujours pas blasé, pas fatigué, pas éreinté par tes 1552 bibillets ?

1. Euh… 1552 bibillets ? Qu’ai-je à faire avec la performance ? Je laisse ça aux Managers, aux Comptables, aux Députés rentiers, aux Infirmes de l’Echange, aux Communicancans, aux Bartolone, Cambadélis, Juppé & Philippot. Ta question, c’est de demander si écrire dans un blog, c’est du travail ? Pas vraiment mais la rédaction, la mise en ligne, oui, ça prend un peu de temps et de l’énergie. Comme il me faut dormir (j’ai besoin évidemment de reconstituer ma force de travail en dormant) c’est surtout le lendemain, au matin que ça surgit, que ça resurgit. Mais ça mature, ça peut prendre vaguement forme à la lisière du sommeil, en bordure du rêve, dans le silence de la Nuit. Au réveil, suis toujours un peu étonné par mon courage matinal (j’en ai), je me lève, j’ai le clavier à disposition, les mots sont là, ils bondissent, ils rugissent dans la lumière bleutée de l’écran. Tout vient. La rage d’écrire. L’envie bienvenue de dézinguer. Quelque chose de méchant passe alors dans mon écriture. Là, je ne suis copain avec personne. Avec personne. Méchant avec tout le monde. C’est ma présence d’écriture. Mais j’arrête là. On ne peut pas faire la théorie ou la description de ces moments, même si c’est tentant. Pour résumer, voilà un phototexte… très pompeux mais qui le dira beaucoup mieux que moi : Ecrire ? Une respiration.

ecrire

  • Que veux-tu faire passer dans tes billets ? Et un blog ça sert à quoi ?

J’avais fait il y a quelque temps un clip sur «C’est quoi un blog ?» pour dire de façon un peu infantile qu’un blog est utile. Depuis, j’ai vieilli, je suis plus proche de cette vérité : un blog, ça ne sert strictement à rien. Ce constat fut une surprise mais pas forcément un truc désespérant car c’est humain de constater l’inutile. Note ça :  l’humain, c’est parfois/souvent creuser l’inutile. De cet acte curieux, quasi-indéchiffrable, faudrait pas le brandir comme un étendard. Non, pas de gloriole à retirer de tout ça. Faut se laisser aller à l’inutile, le laisser venir, l’accompagner. Au bout, il y a -peut-être- de la surprise, de la trouvaille, de la justesse.

  • Une part de tes billets s’éreinte sur l’arête politique… Et ça, ça vise quand-même à être utile, à apporter une pierre à l’édifice… Chez toi, à l’édifice de la Contestation.

blogueur-11En ce Monde, comme tout va de travers, on est bien obligé de parler politique et des hommes qui la font (peu de femmes hélas). Là me revient cette phrase de Brecht. «Dire aux hommes politiques : «Ne touchez pas à la littérature» est ridicule mais dire à la littérature : «Défense de toucher à la politique» est inconcevable». Je me suis répété : oui, oui, pourquoi ne pas dire, répéter aux blogueurs et lecteurs de blogs : «Défense de toucher à la politique» est inconcevable». Mais, «politique», faudrait s’arrêter sur le mot, l’élargir, ne pas le confondre avec la politique politicienne, médiatique, avec le commérage instantané. Lui donner de la pulpe, quoi !

 .  Quand on te lit, on voit que tu dézingues. Comme si il y avait, chez toi, une part de jalousie envers ceux qui sont reconnus ?

Reconnaissance ? Là tu parles des Instances de Consécration et des individus qui délivrent les Brevets d’Entrée. Ah bon, il faudrait viser une place dans le Onze de départ, vouloir se placer en Haut de l’Affiche, entrer dans l’équipe des Forts, des Puissants ? Enfin… forts, puissants, ces vocables me sont devenus désuets. Dans ma nosographie-bibi, ce sont désormais crapules et charognards qu’il faut dire. Qu’ai-je donc à voir avec eux ? Je n’ai aucune intention d’être leur douzième homme, leur poids lourd de connivence. C’est qu’on ne boxe pas dans la même catégorie. Pour exemple, ce constat réaliste : le journal de Lagardère du dimanche fait 300.000 lecteurs, TF1 fait 4 millions de téléspectateurs par jour quand je fais 150 lecteurs/jour. Mais y a plus ! Ces arrogants-là n’ont rien de vivant, tout le monde le sait. Ils ont leurs Experts surexposés, leurs Toutous, ils ont l’Audimat, ils occupent le TOP 100 en permanence.

Mais dépassons ce simple constat : l’horreur ne réside pas seulement dans le Majoritaire et dans le Pourcentage. L’horreur, c’est que ces crapules, ces charognards, ces Miliciens de la Pensée Unique nous contaminent. Ils s’insinuent dans nos chairs, dans nos fibres, ils quadrillent nos rêves, ils les cadenassent. Ils volent notre vie, ils la piétinent. Et là, je convoque le Camarade Lénine : «Le cadavre de la société bourgeoise ne peut être mis en bière et porté en terre. Le cadavre est parmi nous, il pourrit et nous contamine».

  • Et par quoi passe cette contamination ?

Par ce Vocabulaire de Mort délivré en flux continu. Par cette Parlocratie libérale. Tiens, j’ai posté dernièrement un tweet en me pinçant le nez de dégoût. Obligé que j’étais de crier au secours. «Ah, ouvrir la radio et passer sa journée à écouter les vieilles potiches pro-libérales : Hubert Védrine, Pascal Lamy, François d’Orcival. Bouh». Tu devines là, le désespoir derrière, le manque d’oxygène, le pouls qui s’affole ? Ma vie, toute ma vie, ma matinée, mon après-midi, mes soirées dépendent de ces Chiens de Garde ! Tu vois le malheur ? Tu vois l’horreur ? Tu vois à quoi on en est réduit ? A tirer sur ces crapules pour se défendre. Et il y en tant d’autres. Tant d’autres crapules, oui, ça pullule. Ces charognards nous étouffent. On étouffe, les gens étouffent. Tu comprends ?

  • Oui. C’est vrai, ça grouille cette vermine. Rien d’autre à rajouter, BiBi ?

Non, rien de rien… ou trois fois rien mais ça sera pour une autre fois. Alors, merci et bon week-end à toi.

12 Responses to LE BLUES DU BLOGUEUR.

  1. joëlle Thabaud dit :

    Pourquoi tu mets la télé, la radio ?
    Quant au blog, à l’écriture….oui cela sert un peu pour les autres….mais beaucoup pour soi….J’ai repris mon boulot ..

  2. BiBi dit :

    @JoëlleThabaud
    Oui, l’écriture… pour garder un peu de dignité.

    Quant à mettre ou ne pas mettre les radios, les télés. Bien sûr. Mais elles s’ouvrent devant toi sans qu’on le veuille. L’autre jour, chez le carrossier, au contrôle technique, 3/4 d’heure de radio en attendant. BFM à la cafétéria. Les Unes sur les placards en marchant dans les rues. Et passant sur France Culture, Finkielkraut.
    Etc. Etc.

  3. Jeannedau dit :

    On est petits face à ceux qui tiennent le devant de la scène et de plus on a coupé le son. Certains ne l’ont jamais eu d ailleurs – les plus nombreux.
    Tenir.

  4. joëlle Thabaud dit :

    C’est vrai ….je crois que je suis toujours dans ma bulle, je ne sais pas combien de temps cela durera…..Je vois peu de monde…pour l’instant cela ne me dérange pas…Je n’achète rien, je fais tout moi-même, j’achète juste la farine et l’huile et je vais chez des producteurs locaux ..ils n’ont pas la télé non plus, le garagiste non plus !!!! Juste quelques replay …et encore. Cela ne veut pas dire que je ne fais rien…..j’ignore une bonne partie du monde …On verra combien de temps ce dernier voudra bien m’ignorer !

  5. BiBi dit :

    @Joëlle.

    On vit comme on peut.
    Des fois à l’abri.
    Le plus souvent à l’air du Temps… insupportable.

  6. joëlle Thabaud dit :

    Oui,
    le silence ….n’a jamais fait autant de bruit .

  7. michelle Brun dit :

    Évitez au maximum la TV et les commentaires Radio oups ! Mais surtout ne pas se terrer , ah ça non alors ! Sortir marcher courir .
    Il y a encore des gens positifs dans les rues , dans les parcs, allez au ciné , voir les expos. Et puis écrire comme toi Bibi : blog, lettres, bouquins, (même si ton bouquin n’est pas proposé sur tweeter pour #vendrediLecture…;-) Écrire … Bonne fin de semaine à tous
    Michelle

  8. BiBi dit :

    @Michelle
    Si tu as lu et vu mes dernières poussées de fièvre d’écriture, tu as du te rendre compte qu’il n’est pas question de se terrer.
    Clermont-Ferrand.
    Marseille.
    Aigueperse.
    Sans compter les petits livres sous le bras et sous les futaies.
    Quant à écrire, oui. Ecrire débraillé…. selon la formule-bibi 🙂
    http://bit.ly/2dP2y3Y

  9. michelle Brun dit :

    oui j’ai tout lu ou presque 🙂 je répondais aux commentaires « plus haut » :-)) Et au plaisir de te croiser en Auvergne …

  10. Robert Spire dit :

    « La poésie, avec des forces vivantes, avec des gens, et de toute façon, me donne de plus en plus de plaisir. On doit construire autour de soi un monde poétique et vivre dans la poésie. » Lettre de Novalis à Caroline Schlegel, 20 janvier 1799.

  11. agatheNRV dit :

    Écrire. Penser et rêver tout haut. Partager.

  12. Partager en effet et déjà mettre en ordre ses propres idées…

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