Lectures et bonne bouffe.

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«Les Miscellanées culinaires de Monsieur Schott» (Editions Schott) est à dévorer sans retenue. En plat de résistance comme en dessert, il n’y a rien à jeter. Voila de jolies et courtes incises qui tranchent dans le lard, qui servent de la si bonne soupe qu’on s’arrête à chaque délicieuse cuillerée. Paragraphes en dix, trente, quarante lignes qui touchent à l’Art culinaire, à la Cuisine chinoise, au Lapin gallois, à l’Alimentation texane, à la Madeleine de Proust, bref à toute l’Histoire gustative. Et tout ça est cuisiné dans un joyeux bordel.

Présentons quelques plats du menu  : là, on énumère le nom et la capacité des verres à bières en Australie; ici, on s’arrête sur les propositions de Jonathan Swift (manger les enfants pour combattre la faim); ailleurs, on recense les fleurs comestibles etc. BiBi n’en retiendra que deux. A mastiquer lentement ce passage par exemple de Thomas Walker écrit en 1835 sur la Pensée et les Dîners en solitaire :

DÎNER SEUL : «Les dîners solitaires devraient être évités autant qu’il est possible ; la solitude tend à stimuler la pensée, et la pensée à enrayer les facultés digestives. Quand, malgré tout, on ne peut éviter de manger seul, il faut disposer son esprit à la gaieté en lui ménageant un intervalle de relaxation après les pensées sérieuses qui ont retenu son attention, et en l’appliquant à quelque objet agréable».

Puis, ô surprise, quelques pages plus loin, on tombe sur autre chose. Voilà qu’on apprend d’où vient le mot «SPAM» (cela intéressera les Internautes gloutons) :

SPAM : «Spam (contraction de Spiced Ham, jambon épicé) est une marque de pâté en conserve déposée en 1937. Les Monty Python en ont parodié la publicité indigeste dans un sketch où le menu d’un restaurant, puis les propos qui s’y sont échangés, se réduisent peu à peu au seul mot spam – d’où le choix du terme pour désigner les courriers électroniques envahissants (ou pourriels)».

La Cuisine de Monsieur Schott est un big bazar, un joyeux foutoir et chacun pourra y trouver son conte. Un petit livre qui s’avale en quatrième vitesse. Garanti sans indigestion.

Une redécouverte.

Feuilletant un des numéros de la revue La Polygraphe (N°7/8 de 1999), BiBi redécouvrit quelques poèmes magnifiques, prose amicale tirée d’une œuvre «excessivement humaine», celle de José Pierre, poète, romancier, dramaturge, qui travailla avec André Breton pour la préparation d’expositions sur le Surréalisme. Et c’est un BiBi affamé (mais qui n’en laisse rien paraître) qui mettra ce petit bijou (L’Auberge Espagnole) sur la table afin que tous le partagent :

A la fenêtre d’une auberge,

du côté de Logrono

on pouvait lire ces mots :

Aqui se pueden traer

su comido y sus canciones

Ici l’on peut apporter

Son repas et ses chansons

«Eux sur la photo» d’Hélène Gestern.

Le livre (Editions Arléa) démarre sur une photographie de trois silhouettes (deux hommes, une femme), photographie découverte par l’héroïne, Hélène Hivert. Celle-ci y reconnait sa «mère» et va chercher à savoir – via une petite annonce dans Libération – qui sont les deux hommes qui l’accompagnent. Stéphane, résident suisse, lui répond. S’ensuit un échange de lettres et de mails. Le livre avance par moments successifs de bascule. Lettre après lettre, Hélène va (re)découvrir le tragique de la vie en traversant les zones sombres, inconnues de son histoire. Ce chemin douloureux est celui que suivent les «enfants qui oublient leur naissance» ou qui la mettent «derrière leur mémoire».

Le «procédé» épistolaire est parfois rompu par la description d’autres photos de famille et par la transcription de journaux intimes reproduits in-extenso. Ces ruptures de rythmes font hélas perdre un peu d’acuité au livre d’Hélène Gestern. Le rapport amoureux entre Hélène et Stéphane par exemple est à peine esquissé au profit de la recherche de la Vérité. Mais l’architecture du livre qui repose sur le secret de famille et la photographie (un hobby-BiBi) rend ce premier roman prometteur.

One Response to Lectures et bonne bouffe.

  1. de la mata jeanpaul dit :

    Quand on bouffe,on ne pense pas…sinon ça veut dire que c’est dégeu…et comme votre  » horreur de fromage « , ne se vend pas à Paris, je suis bien tranquille…hé,hé ?

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