Category Archives: BiBi joue au foot

Le bilan du Mondial d’Afrique du Sud passé sous silence.

Qu’avons-nous entendu sur la Coupe du Monde 2010 en Afrique du Sud ! Toutes les belles âmes ont applaudi à la nomination de ce pays africain. Aujourd’hui, à l’heure des bilans, on en dit, on en écrit beaucoup moins. Sauf sur le Blog à BiBi.

1. And the Winner is… Sepp Blatter. Ne soyons pas surpris : le seul vrai gagnant du Mondial d’Afsud, c’est cette footue FIFA qui a augmenté ses bénéfices de 50% par rapport à 2006, réussissant même à se faire exempter d’impôts sur l’ensemble de ses ventes. «Les privilèges que nous avons dû octroyer à la FIFA étaient tout simplement excessifs. Ils ont rendu impossible le moindre gain financier pour l’Afrique du Sud», admet aujourd’hui Adrian Lackey, porte-parole des autorités fiscales sud-africaines. «Excessifs» : quel joli mot !

2. L’Œuvre Suisse d’Entraide Ouvrière, ONG active, explique qu’«en juillet 2010, on dénombrait même une perte de 4,7 % d’emplois par rapport au même mois, en 2009»

3. Le Stade Green Point, situé au Cap a coûté près de 400 millions d’euros. Il est aujourd’hui au bord de la faillite.

4. Morne Du Plessis, ancien troisième ligne, reconverti en directeur exécutif du Consortium Sail/Stade de France lâche : «Nous avons fait de graves erreurs dans l’estimation des coûts et dans les prévisions de bénéfices qu’aurait pu générer ce stade».

5. Tromperie… sur les Éléphants blancs : Sur les dix stades de la Coupe du monde, trois sont ce qu’on appelle des «éléphants blancs». Ces stades trop grands et trop onéreux pour pouvoir être utilisés après le Mondial sans générer de coûts supplémentaires.

6. Enfin, les dépenses en vue du Mondial auraient permis de construire des maisons pour 2,4 millions de personnes, parmi les 12 millions qui, en Afrique du Sud, cherchent toujours un toit.

7. Les contribuables français, eux aussi, auraient beaucoup à se plaindre. Certes, le Scandale Annecy 2018 (20 millions d’euros jetés à la poubelle) est moindre mais, à l’heure du bilan, ce sont les mêmes requins qui montrent les dents et qui survivront au Naufrage annoncé (par BiBi).

Merci à Marie Bender pour avoir signalé à BiBi la source (Avenir Net)

Un football méconnu : le football turc.

On a peu parlé du football turc sauf à évoquer le transfert de Niang qui a quitté l’OM pour Fenerbahce (équipe déjà éliminée par les Suisses de Berne en Coupe d’Europe). Le football turc a été absent du Mondial en Afrique du Sud et déjà les grands clubs d’Istanbul et d’Anatolie affûtent leurs armes. BiBi est allé s’informer sur ce football méconnu, un football un peu différent de ceux dont on parle continuellement – jusqu’à nous assommer ! A savoir les championnats d’Italie, d’Espagne, d’Angleterre.

La Süperlig 2010/2011.

A la fin de l’année dernière, une équipe d’Anatolie – autre que Trabzonspor – celle de Bursaspor a remporté le Championnat ( SüperLig) devant les grosses écuries d’Istambul. Bursaspor sera dans le groupe C de la Champion’s League avec Manchester United, Valence et Glasgow Rangers comme adversaires.

La saison, qui s’est ouverte le 15 août, sera passionnante car l’effet de surprise ne jouera plus. La Süperlig se jouera en deux périodes avec 17 premiers matches suivis d’une trêve (du 19 décembre au 23 janvier). Le championnat, dont la première édition eut lieu en 1959, prendra fin le 22 mai 2011.

Les promus s’appellent Konyaspor, Bucaspor, Karabükspor.

Des chiffres, des Infos…

La première édition de 1959 comportait deux groupes : les Rouges et les Blancs ( 8 équipes dans chaque groupe).

Fenerbahce (leader des Blancs) fut finaliste et battit le leader des Rouges, Galatasaray. L’année suivante (1960), on choisit le régime toujours actuel (un seul groupe de 18 équipes).

A partir de la saison 87-88, 3 points furent attribués au vainqueur d’un match ( contre deux auparavant).

Fenerbahce et Galatasaray ont remporté 17 fois chacun le Championnat. Le Beksistas est à 13 victoires et Trabzonspor, lui, est à 6 trophées. Le record d’équipe invaincue appartient à Galatasaray. Après avoir été battu par Bursaspor 3 à 2 le 25 janvier 1988, l’équipe d’Istambul ne perdra aucune des 40 matches qui suivront.

… et des Joueurs.

Senol Gunes, gardien de but puis sélectionneur national, préserva ses buts pendant 1112 minutes (saison 1978-1979). Il est encore aujourd’hui le recordman de l’invincibilité. Pendant 12 matches de rang, il ne concéda aucun but.

Hakan Sükür, ex-joueur de l’Inter de Milan et de Parme FC, est encore le meilleur buteur turc de tous les temps avec 245 buts en Championnat. Il est également l’auteur du but le plus rapide marqué en Coupe du Monde de football (10.8 secondes en match pour la troisième place face à la Corée du Sud en 2002).

Football : une belle saison qui commence !


Comment détourner les problèmes ?

Le populisme est partout présent : on attaque les forts pour défendre les faibles. On se place sous l’étiquette du «bon sens». Cette façon de voir le Monde emporte certes l’adhésion du plus grand nombre mais elle masque les autres représentations du Monde et tente de les faire taire.

Écoutons cette présentation des choses de la part de Louis Nicollin, président de Montpellier : «Il y a ceux qui aiment le football et ceux qui n’en ont rien à foutre et qui seraient prêts à aller jouer en Laponie si on leur donnait 100 ou 200.000 euros de plus. Les mecs ne pensent qu’au fric. Niang [transféré en Turquie] en fait partie». Fort bien mais Louis Nicollin serait plus avisé de compléter le tableau en nous parlant de ses amis les Agents qui «drivent» le poulain Niang et sur lesquels Nicollin se tait pudiquement.

Le Pouvoir des Agents.

En lisant l’article d’Olivier Joly (JDD du dimanche 22 août), on comprend mieux quels sont leurs pouvoirs. Ce sont les agents qui font la pluie et le beau temps dans les clubs. A l’OM comme ailleurs. Même Jean-Claude Dassier n’ose les contredire. Ainsi devant Anigo («qui cultive des rapports privilégiés avec plusieurs d’entre eux (Hutteau, Aklil, Piola…»), le Président se fait tout petit et ne suit pas Didier Deschamps lui rappelant même « les lois du marché » (du «milieu de… terrain » disent des mauvaises langues sur la Canebière). Car «l’essentiel, écrit Olivier Joly, c’est d’éloigner Bernès des affaires du Club, quitte à ce que celui-ci y soit perdant». «C’est le prix d’une lutte d’influence et de territoire». Ce vocabulaire ne vous rappelle rien ?

Le foot anglais a les Clubs les plus endettés du Monde.

237 millions de livres sterling de dettes pour Liverpool, jamais classé au-delà de la 5ième place avant la saison dernière. Arrivés en février 2007, Tom Hicks et George Gillett (2 businessmen US) ont emprunté 490 millions, ont multiplié les transferts prestigieux, ont promis un stade etc. Ils espéraient ainsi revendre le club bien plus cher. Ben non…

A Aston Villa, club de Birmingham, le milliardaire américain Randy Lerner a injecté 350 millions de livres sterling en faisant exploser les salaires des joueurs (84% de son budget total). Manchester United tient la tête de l’endettement. Pour l’ensemble des clubs anglais, la dette atteint 56% de la dette totale européenne. Le Club de Portsmouth (qui eut comme Président Arcadi Gaydamak – le bénéficiaire de l’AngolaGate avec Pasqua) a été déclaré en faillite. West Ham a tout juste évité le même désastre. Quant au mécène russe Roman Abramovitch de Chelsea, il a investi 1 milliard de livres sterling depuis sa reprise du club en 2003. Sa motivation ? La passion du football. Sa femme qui présente dans sa galerie moscovite les œuvres détenues par François Pinault a une autre passion : la Peinture…

Et vive le Foot !

Du racisme de l’intelligence envers les « Bleus ».

Zéro de moyenne ?

C’est entendu : il y a des problèmes plus importants que les défaites des footballeurs français mais il est une chose qui frappe BiBi, c’est l’insistance quasi-générale à se moquer du niveau intellectuel de ces footballeurs français, «traitres à la Nation». Étrange cette insistance unanime. Bizarre cette polarisation sur leur (supposée) ignorance crasse. Même les amis de BiBi s’y sont mis… Mais pas que.

Florilège.

Richard de Meudon la Forêt, premier auditeur du «Téléphone sonne» sur France Inter (lundi 28 juin), va plus loin. Il demande, plein de morgue, un «stage d’expression orale» pour rendre «compréhensible le discours des joueurs pour l’ensemble de la population française». Michel Cymès, médecin, animateur du Magazine de la Santé sur France Info, voudrait «soumettre les joueurs de l’Equipe de France à un test de QI».

Ces joueurs sont quasiment ravalés au rang de l’animalité : «Au pire, ce sont des bêtes solitaires et dangereuses» (Jean-François Pradeau, philosophe). Pas loin non plus d’être des décervelés : «Footeux capricieux et milliardaires» qui nous offrent des «prestations sans scrupule ni morale» (Serge Moati). Philippe Sollers y va aussi de son cynisme de dandy et évoque à leur propos un «festival de vulgarité et d’injures», de «disputes de petits chefs rapaces». Claude Askolovitch, lui, voit en eux «des enfants trop riches et trop gâtés» (a contrario, le JDD, journal où il écrit, offre à Michel Pébereau, grand patron, philosophe devant l’éternel, une rubrique sur la Science-Fiction sans sourciller).

Continuons : Denis Masseglia, président du CNOSF, lance que les « joueurs sont pour la plupart, déconnectés des réalités». BiBi avait relevé dans une de ses Flèches les louanges de Denis Masseglia par le Figaro : «Denis Masseglia veut faire rentrer le Monde de l’Economie dans le Sport sous forme de mécénat». Pas déconnecté des réalités, ce Monsieur. Est-il plus intelligent pour autant ?

Non seulement, le joueur de l’Équipe de France est ignare mais il ne travaille pas : « L’élève se trompe. Il n’a travaillé ni en CM2, ni en 6ième… et ainsi de suite jusqu’à la Terminale» (Guy Roux, Libération du 20 juin). Plus loin, l’éditorialiste s’en prend à ces joueurs gâtés en leur accolant le qualificatif d’«autistes», indécent qualificatif qui n’offusque personne.

Les Courtisans et les Ignares.

On a assisté à un défouloir généralisé non sur le pauvre jeu de cette équipe mais sur des attaques de personnes (ici sur leur cerveau – ou sur leur capital culturel pour parler bourdieusement). Étrange unanimité qui interroge BiBi. Ces Ignares en bleu seraient-ils des non-citoyens ? Faut-il qu’ils parlent le Langage de Cour pour avoir une existence agréée ?

Autres questions : n’y aurait-il pas derrière ces anathèmes et ces moqueries en-veux-tu en voilà, un racisme latent, insidieux, de la part de ceux qui se sentent d’une «essence supérieure ». Bourdieu caractérisait ce racisme de « racisme de l’intelligence » (lire son dernier chapitre de «Questions de Sociologie». Éditions de Minuit) distillé par ces Intellectuels-Censeurs.

La déferlante du Mépris.

A traiter l’autre – le Différent-de-Soi – de «con», on dit aussi (surtout) que l’on ne l’est pas soi-même. Que Ribéry fasse dix fautes de français pour s’exprimer, soit. Et alors ? Que certains joueurs aient eu des propos malheureux, des postures très critiquables, soit… mais faut-il  pour autant s’en moquer sans limites… eux qui n’ont pas le même capital culturel et scolaire que le «nôtre». Cette vision déferlante méprise extraordinairement les gens aux trajectoires sociales inédites et aux ascensions sociales fulgurantes (lire par exemple ce qui a été écrit sur celle du joueur emblématique qu’est Anelka, venu de Trappes et richissime à 18 ans).

Un déficit de pensée.

Derrière ce ressentiment brutal envers ces « illettrés» qui ont quand même «réussi», derrière ces dépits rageurs contre ces «enfants gâtés» ou contre ces «caïds immatures» issus évidemment des éternelles «classes dangereuses», BiBi y voit plutôt un… dangereux déficit de pensée.

Anelka, Finkielkraut et la Pensée néo-libérale.

Première et dernière page du JDD.

Le Football est, bien entendu, à la Une du numéro dominical du JDD avec cette question «Pourquoi tant de haine ?». Hasard objectif : en dernière page, on a la réponse avec un grand cadre publicitaire plein d’amour. L’encart nous offre Pelé, Zidane et Maradona jouant au baby-foot pour le plus grand Sponsor de luxe de la Planète (et de la Coupe du Monde) : le Louis Vuitton de Bernard Arnault, d’Hubert Védrine et de Bernadette Chirac. Au second plan du cliché, on aperçoit un sac Louis Vuitton rembourré (de billets d’argent sale ?)

Indécence et obscénité des Cols blancs sportifs.

Olivier Jay de son arbre perché est descendu réclamer dans son édito «plus de décence». En contrepoint, BiBi lui conseillerait bien de relire le billet écrit ici-même sur Frédéric Thiriez et l’indécence.

Alain Finkielkraut, lui, s’avance sur le terrain de la culpabilisation et circonscrit le problème autour des seules personnes que sont Domenech l’entraîneur («sans style et sans âme») et  les joueurs («sales gosses boudeurs» pleins d’ «arrogance j’men foutiste»). Comme à son habitude droitière, le Monsieur oublie de citer ces absents de marque dans sa démonstration que sont les cadres dirigeants, le Président de la Fédération et les Ministres qui ont donné l’aval à tout ça. Rappelons ici pour les footeux le capital de connaissance sportive de Rama Yade : en interview, elle parlait des phases éliminatoires 1998 pour la France, qui, pays organisateur était qualifié d’office ! Dans son article, ce sont pourtant les seuls joueurs que Finkielkraut qualifie d’ «inintelligents».

La feinte de Finkielkraut ne prend pas.

Ce même Finkielkraut si précis dans la mise au pilori des joueurs (il cite Ribéry, Anelka, Gallas) s’en remet à un vague « on » qui ne fait de mal à aucune mouche dirigeante : «On a voulu confier l’équipe de France à des voyous opulents et pour certains inintelligents » peut-on lire sous la plume du grand Penseur. Sur ce «On», rien ne sera dit, rien ne sera écrit. Là encore, BiBi lui conseillerait la lecture de la Catégorie BiBi-Foot, il y apprendrait que les «voyous opulents» sont à chercher du côté de Sepp Blatter et de Jack Warner, tous deux au sommet de la FIFA.

Stigmatisation et recherche de bouc-émissaire.

Voilà la méthode du philosophe : une méthode au prix du silence sur le Sponsoring éhonté (qui interdit aux petits marchands ambulants africains le bénéfice des ventes aux portes des stades), au prix de la Solidarité obscène des Politiques (on a demandé à la population sud-africaine de s’éclairer à la bougie pour ne pas bouffer trop d’électricité et permettre ainsi la diffusion des matches), au prix d’un déni au sujet de la gravité dans le langage (en écho des propos d’Anelka, le «Casse-toi pauvre con» oublié n’a pas été en Une du JDD).

Un Sport de gentlemen ?

Alors que réclame donc notre Philosophe ? Il souhaite virer ces «voyous opulents et arrogants» et en appelle à «sélectionner des gentlemen» (des Zidane sans coups de tête peut-être ?). Des «gen-tle-men» ! Ah, le beau et grand mot : il veut des êtres dépassionnés, maîtres de leurs corps et de leurs instincts, animés du Fighting-Spirit et au langage « irréprochable ». Vieille lune et vieil idéal du Sportif aristocratique anglais coincé entre Oxford et Cambridge, idéal né sur l’ignorance des conditions de vie de la classe ouvrière d’alors décrites par Engels.

Cruauté du Monde.

Finkielkraut oublie là aussi le Monde contemporain fait de brutalité, de cruauté (voir le marché esclavagiste des jeunes footballeurs africains et sud-américains), de compétitivité féroce. Il croit possible – ce naïf –  un Monde débarrassé de divisions et fait d’une «communauté liée» où serait gommée la place de chacun (joueurs, spectateurs) dans l’espace des positions sociales, où seraient abolis les clivages sociaux. Pauvre rêve ? Pas seulement. Ce type d’argumentation vient couvrir et dissimuler à bon escient les «dérives» d’un sport qui a «intégré, depuis longtemps, dans ses structures de gestion et les structures mentales de ses agents, la pensée libérale (1)».

(1). William Gasparini. Article de Libération du 20 juin 2002 : «Le Foot, Cheval de Troie du néolibéralisme».